L'histoire :
Cette année là, l’agent Ian Mallory de la CIA est détaché en France, pour former des cadres de la DCRI à traquer la cybercriminalité. Sa femme est enceinte, il vient d’acheter une nouvelle voiture… Soudain, un mystérieux motard casqué met fin à cette heureuse séquence de vie, d’une seule balle, tirée à bout portant à travers la vitre. Ian sort de son coma 3 ans plus tard, à Boston. Il apprend que sa femme et le bébé qu’elle portait n’ont pas survécu. Lui-même est un miraculé de la neurochirurgie, bien qu’il pâtisse d’une séquelle importante : une atrophie émotionnelle. C'est-à-dire qu’il perçoit désormais les émotions en différé, plusieurs heures après les faits sensés les susciter. Il refait sa vie auprès d’une jeune avocate déjà maman d’une ado, Naomie, et lui fait une petite sœur, Laureen. Lui, trouve une voie de reconversion viable, en tant qu’écrivain de thrillers. Sans doute exorcise t-il ainsi le traumatisme de l’exécution qu’il a vécue en France, et dont il n’a jamais percé les raisons. Il enrage d’ailleurs de ne pouvoir accéder à l’unique pièce à conviction pour remonter la piste du tueur : la balle qui se trouve encore dans son cerveau. Et puis, cette nuit là, il est réveillé par un bruit dans la cuisine. Il de lève et découvre Naomie, en train de fouiller les poches d’un cadavre ensanglanté : elle vient de planter un long couteau dans le cœur de son petit ami. Cette scène laisse évidemment Ian de marbre. Il s’occupe placidement de nettoyer et d’effacer toute trace du crime, non sans demander froidement quelques explications à sa belle-fille…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Un principe scénaristique de base intéressant, des protagonistes attachants et psychologiquement bien en place, une narration impeccablement rythmée entremêlant judicieusement action présente et flashbacks, une bonne dose d’hémoglobine, un vaste potentiel de développements futurs : il n’en faut pas plus pour mettre sur de bons rails un thriller trippant à souhait. Le concept original et palpitant de Synchrone, imaginé par le scénariste Vincent Delmas (c’est sa première BD !), se trouve la pathologie émotionnelle du héros : la désynchronisation des sentiments est à la fois un handicape social majeur et… un incommensurable avantage, en tant qu’agent de terrain ! La question centrale de la gestion des sentiments est ici une idée géniale et tentaculaire, qui peut dériver sur de nombreux rebondissements. Pour le moment, se greffent sur ce canevas : le mystère de l’attentat dont il a été victime, le crime (accidentel ?) commis par sa belle-fille, une vraie teigne de journaliste, le chantage d’anciens collègues… Et tout s’imbrique à merveille, à un rythme soutenu mais limpide. Certes, cela se fait au prix de quelques invraisemblances, mais on est prêt à les pardonner pourvu que le suspens demeure tendu et le divertissement de qualité. Le dessinateur italien Ricardo Crosa (décidemment très prolifique ces derniers mois) inscrit le thriller dans un découpage serré et un dynamisme de trait congru, semi-réaliste et détaillé. Fans de thrillers, n’hésitez pas à synchroniser cette nouvelle série avec votre bibliothèque…