L'histoire :
Dans une ville coréenne, cinq maîtres sont bons amis. L’un arrive à retourner les pièces d’un seul coup grâce à la technique de la griffe du diable ; un autre est un spécialiste de la pêche ; un troisième sait faire tout type de gâteaux... L’un des maîtres tente sa chance et parvient à retourner toutes les pièces posées sur un magazine d’un seul coup. Tout le monde est bouche-bée devant cette performance mais certains doutent très rapidement de son honnêteté. Qu’importe : il a gagné plus de deux millions de wons ! Les cinq maîtres se réunissent ensuite dans un funérarium. En effet, l’un des cinq amis a été tué de plusieurs coups de sabre à deux heures du matin. Cela s’est passé près de la supérette Bangju alors qu’il jouait aux jeux vidéo, sa spécialité. Il devait jouer tranquillement sur une borne d’arcade avant de rencontrer ses criminels. Les maîtres soupçonnent l’existence d’un autre gang bien plus violent et dangereux que leur groupe...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Pour son premier manwha, Lee Ji-Woo signe un album très iconoclaste. Totalement en dehors des sentiers battus, le début est très déroutant. On identifie avec peine les personnages aux trognes vieillissantes et aucune précision ne nous est donnée sur les lieux ni l’intrigue. Il faut dire que le postulat de départ est étrange et se base sur des pouvoirs quasi paranormaux de vieux papys, mais des pouvoirs qui n’ont rien de super-héroïque : retourner des pièces, savoir faire tout type de gâteaux... Divisée en plusieurs tableaux comme des mini chapitres qui se suivent, l’œuvre est déroutante et peu accessible. Certains dialogues sont surréalistes et, même si l’on comprend bien que le nœud de l’intrigue se base sur le meurtre d’un des maîtres, l’ensemble reste trouble. Dans une enquête policière tortueuse, on nage entre suspense inquiétant et scènes délirantes. En effet, on est parfois à la limite de la noyade tant certains passages sont terriblement obscurs, comme par exemple le moment où le maître pêche et pense avoir au bout de sa canne une série de meurtriers aux tenues noires de jais. Même le meurtre qui amène à l’enquête est traité de façon opaque avec un mélange de délires et de réalité. On ne sait plus très bien si le maître se bat dans son jeu vidéo où s’il est véritablement en prise avec une série d’assassins, jusqu’au game over qui marque la fin de son existence. La narration est délibérément saccadée et les évènements s’enchaînent sans réel lien ni explication. Le dessin noir et blanc avec des aplats de gris participent à cette atmosphère à la fois surnaturelle et très réaliste. Lee Ji-Woo a voulu laisser planer un doute sur la forme de son album et il faut bien reconnaître que l’effet est réussi. Malheureusement, c’est aussi difficilement lisible tant on identifie mal les personnages et les actions. Certains passages sont complètement surréalistes et franchement incompréhensibles. Le tout est parfois violent et les scènes hachées façon cinéma à la Tarantino. Le ton sombre et envoûtant rappelle également le cinéma de Chan-Wook Park (réalisateur coréen de Old Boy). Cependant, à trop vouloir surprendre et complexifier le récit, on finit par s’y perdre. Dommage !