L'histoire :
A la fin du XIXème siècle, un jeune artiste-peintre du nom de Jules Toupet, inconnu mais talentueux, a suffisamment trainé à son goût à Constantinople (actuelle Istanbul). Il offre un dernier dessin à une jeune femme, puis s’enquiert, sur les quais, d’un capitaine qui l’accepterait à son bord, à destination de nouveaux horizons. Hélas, aucun n’a précisément besoin de talents artistiques… L’on cherche plutôt des courageux dotés du pied marin. Jules finit par s’endormir sur des caisses, au clair de lune, après avoir contemplé le portrait de sa muse, Anna. Il est réveillé par un violent orage et ne sait où abriter ses œuvres, menacées d’être trempées. Depuis le pont d’un voilier, une providentielle jeune femme l’empresse de se réfugier à son bord. Elle s’appelle Salomé Ziegler, elle est capitaine de l’Odysseus. Cependant, le gîte offert est intéressé. Elle présente en effet quelques toiles spectaculaires à l’œil de son hôte – une course de chars, une attaque de trirèmes pirates – et lui demande s’il en connait l’auteur. Evidemment, il s’agit d’Ammôn Kasacz, un des plus grands peintres de la Grèce antique. Jules possède même un carnet de croquis de Kasacz, ce qui éberlue Salomé. Mieux que ça : Jules sais comment retrouver le peintre, en remontant la piste de ses toiles… Un accord est aussitôt passé entre ces deux fans de Kasacz : Salomé embarque Jules pour qu’il l’aide à retrouver Kasacz, et il paiera son voyage d’une toile par semaine…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
En 2005, Emmanuel Lepage avait publié Les voyages d’Anna – du prénom de sa fille – un recueil de croquis sous forme de carnet de voyage, déjà aux éditions Daniel Maghen et déjà « scénarisé » par sa compagne, Sophie Michel. Très logiquement, les époux inscrivent les Voyages d’Ulysse – du prénom de leur fils – dans la continuité logique de leur hommage parental. Il s’agit cette fois bel et bien d’une bande dessinée, et non d’un nouveau voyage documentaire, quand bien même le rythme séquentiel reste très contemplatif et monocorde. Aux côtés d’une femme capitaine imprégnée de culture artistique depuis l’enfance, le héros Jules Toupet, déjà entrevu dans Les carnets d’Anna, se met cette fois en quête d’un peintre spécialisé dans l’antiquité grecque, à travers différentes villes portuaires de la Méditerranée. Spectaculaires, les œuvres de ce second peintre proviennent en réalité des pinceaux de René Follet, pour des toiles originales ou plus anciennes (voir son recueil les Grecs, publié en 1971). Imprégné de romantisme et de panoramas maritimes, régulièrement ponctué de magnifiques gréements mouillant aux ports, l’immense talent artistique de Lepage s’alterne ainsi de temps en temps de chefs d’œuvres de Follet, pour un résultat visuel virtuose, évidemment de très haute volée. La narration prend dès lors le temps de moult flashbacks, détours, pauses et circonvolutions, essentiellement destinés à faire durer le plaisir de l’œil sur 221 pages – suivies d’un long carnet de croquis, comme les affectionne Daniel Maghen. Tantôt, des extraits de l’Odyssée d’Omère sont intercalés sur de petites feuilles de papier calque, comme pour bien souligner la métaphore avec l’aventure initiatique.