L'histoire :
En relisant une lettre d’Anna, la femme qu’il aime, Jules se rend compte qu’il ne lui a jamais raconté ce qui l’a poussé à être peintre et encore moins d’où vient sa fascination pour la mer. Dans son cahier de notes, il retranscrit chacune de ses pensées et réalise quelques croquis pour illustrer et immortaliser le moment présent. Jules a eu trois maîtres dans sa vie pour devenir ce qu’il est. Sa mère d’abord, la première femme de sa vie. Son absence est un grand vide. Elle peignait avec beaucoup de générosité et l’a toujours encouragé. Son second maître est son père qui, par sa passion de la littérature, lui a permis de rêver. Puis vient Ammôn Kasacz, le peintre qui, de par son enseignement et sa rigueur, lui a permis de dépasser ses limites. Ammôn avait un atelier à Paris sur l’île Saint Louis. L’homme, observateur avide et attentionné, se nourrissait de ses balades au cœur de la capitale, pour ensuite s’enfermer dans son petit cabinet et peindre. Contrairement à son maître, pour Jules, les lieux ont de l’importance, ils ont une influence sur la façon de peintre. La lumière, les couleurs et l’état d’âmes sont dictés par le lieu dans lequel nous vivons. D’ailleurs, d’après Jules, c’est la raison pour laquelle il a tant voyagé.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Prendre le temps de choisir ses mots pour les coucher sur papier est un luxe que le XXIème siècle ne permet plus, pour le plus grand nombre. Ce postulat, légèrement réactionnaire, est mûrement réfléchi. Les lettres manuscrites sont mortes, vive les lettres. A l’heure où le temps a un prix, les correspondances avec des tiers se résument à des « papillons adhésifs » (pour ne pas citer la marque entrée dans le vocabulaire commun), des messages électroniques ou des textos avec un nombre de caractères limité (par l'opérateur ou la flemme de l’expéditeur). Les Voyages de Jules propose un concept intéressant mais pas novateur, sur des croquis et des doubles pages illustrées d’Emmanuel Lepage et René Follet. Sophie Michel vient assembler un récit scénarisé ponctué de quelques lettres formant une correspondance entre Jules Toulet, Anna Fabri-Fontana et Ammôn Kasacz, les personnages des précédents opus. Le tout se lie plutôt bien pour former un récit fluide qui prend le temps d’être raconté. Le travail graphique est plaisant car l’ensemble de l’album est calligraphié avec des styles d’écritures différenciées afin de duper au mieux le lecteur. Au niveau du dessin, les noms des auteurs sont gages de qualité et de beaux traits. Les hautes murailles de pierres battues par la mer déchaînée du phare d’Ar Men reviennent en mémoire des connaisseurs de l’œuvre de Lepage. Ainsi, cet ouvrage sous forme de carnet de voyage laisse le lecteur voguer au gré des vents et des fines cordes tissées par les auteurs pour découvrir la vie de Jules.
