L'histoire :
De nos jours, une journaliste rend visite à un vieil homme riche mais fatigué. Il accepte de la recevoir car c’était une de ses élèves. Devant lui, elle ne tarit pas d’éloge sur la nature de sa pensée, qui aurait changé la destinée de l’humanité. A peine est-elle repartie, l’homme s’effondre d’une crise cardiaque. 20 ans plus tard, 15 individus a priori triés sur le volet sont enlevés depuis les 4 coins de la planète : un fleuriste de Buenos Aires, un homme dans une bibliothèque à Oxford, une mémère à chats à Copenhague… Tous sont chloroformés et se retrouvent isolés en tenues de prisonniers, dans des cellules séparées au sein de la base « Pélican B ». Le Dr Kresse, un savant en blouse blanche, briefe une équipe de gardiens : ils ont été recrutés pour 6 mois, afin d’encadrer une expérience top secrète et primordiale. Les cobayes doivent être appelés des « unités » ; eux-mêmes sont des compagnons ; les scientifiques qui mèneront toute une série d’entretiens doivent être appelés des « confidents ». Les premiers jours, les « unités » ne comprennent ce qui leur arrive. Pourquoi et de quel droit les a-t-on privé de leur liberté ? Leurs réactions sont variées : récalcitrants ou effondrés… et ce sont les interactions entre ces comportements que les scientifiques ont l’air de mesurer à la loupe…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après Le complexe du Chimpanzé, et dans le registre similaire du thriller d’anticipation scientifique, les mêmes auteurs se lancent aujourd’hui dans Le protocole Pélican, d’ores et déjà annoncée en 4 tomes. Dans cette série, de mystérieux « puissants » financent des scientifiques peu scrupuleux des droits de l’homme, pour une onéreuse campagne d’expériences psychologiques (sur le long terme), à partir d’un panel composite d’individus enfermés contre leur gré. Oui, mais pourquoi eux ? Quels résultats peut-on attendre d’une telle séquestration ? Qui sont les vrais cobayes de l’histoire ? Ces questions font tout le sel de la série et des tensions qui en découlent. Des personnalités se distinguent peu à peu, dans chacune des familles de protagonistes (unités, compagnons et confidents, selon la terminologie imposée). Leurs mises en contacts devraient parvenir lors des tomes suivants à quelque chose qui ressemblerait à une « étincelle » ou une « réaction chimique »… sans qu’on en sache plus pour le moment. Le scénariste Richard Marazano se frotte ici à un domaine scientifique peu défriché en BD. Il s’approche ainsi de la fameuse expérience de Milgram sur l’obéissance (qui a dérivé sur une émission télévisée il y a peu). Et avec tout le savoir-faire qu’on lui connaît, il instille en sus la dimension nécessaire du suspens et du spectaculaire (à ce titre, la dernière case est un chouette cliffhanger). Jean-Michel Ponzio, spécialiste de la bidouille Photoshop® et du dessin ultra-réaliste recomposé à partir de clichés, livre lui aussi un travail graphique très abouti et cohérent (beaucoup moins roman-photo que sur certaines de ses productions). Un sujet original et un suspens au paroxysme : cette mise en bouche délivre ce qu’il faut pour donner l’eau à la bouche…