L'histoire :
Morgan Navarro n'a pas fini de se plaindre, dans une société qui perd de plus en plus de son sens et de sa logique. L'école ne fait qu'ennuyer les jeunes. D'ailleurs, à chaque fois qu'il passe voir ses enfants, il s'amusent en cachette sur l'ordinateur ou la console. Ce n'est pas la joie non plus dans son couple : la routine prend le dessus et ils ont tous deux de plus en plus de désaccords sur des sujets de fond. Sans compter les disputes sur qui doit faire le ménage. On ne peut même plus parler de racisme sans que tout le monde bondisse en insultant l'autre et en le taxant de fasciste. On ne peut pas non plus se moquer des femmes voilées pendant Halloween ! En plus, la crise frappe tout le monde et les malversations des politiques font grincer des dents. Quelle époque !
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Morgan Navarro revient avec son personnage alter ego (autoportrait ? autofiction ?) réactionnaire à la langue bien pendante. Le fonctionnement reste toujours le même : le personnage se confronte à la société de son temps et en montre les contradictions par des réflexions ou remarques acerbes et impitoyables. Cette série surfe donc sur l'actualité et quelques sujets vont vous rappeler des souvenirs proches : la réforme de l'éducation nationale, les scandales politiques, la baffe de Manuel Valls, le fameux hand spinner... L'auteur se renouvelle un peu en intégrant ses enfants, qui prennent de plus en plus d'importance et s'attaquent surtout à des sujets hautement délicats : le port du voile, le féminisme ou encore le transgenre. On peut admirer cette prise de risque, même si le traitement est fin et subtil. L'annexe final qui reprend les réactions des lecteurs montre bien que l'humour n'est pas sans danger. C'est aussi le ton choisi qui fait l'originalité et le sel de la série. A l'aide d'un dessin simple et efficace, Navarro cultive l'ambiguïté en maniant philosophie sociale et absurde comme personne. C'est aussi le cas avec ce personnage dont on ne sait s'il est sympathique ou franchement insupportable. Ce nouvel Achille Talon à la morale étriquée et complexe peut susciter le rire comme le « malaise ». En tout cas, il permet de prendre du recul sur tout : la société d'aujourd'hui, les lois, la politique, la religion, la guerre des sexes et même, bien entendu, les réactionnaires... Dans une époque chargée et lourde, cette parenthèse humoristique fait du bien !