L'histoire :
Augustin vit avec Romain. Depuis quelques années déjà, les deux hommes ont construit un couple plein de contradictions. Leurs amis sont unanimes pour dire qu'ils se sont réellement trouvés, Augustin le révolté ayant redonné un sens à la vie de Romain, après une période de dérive. Alors lorsque « Gus » annonce à Mathilde, la sœur de Romain, qu'il veut le demander en mariage, la jeune femme exulte. Tandis que les amis s'enthousiasment, tout dans la vie des deux hommes va alors prendre les contours d'une histoire finalement comme les autres. La demande en mariage en bonne et due forme, les questions sur l'engagement pour un couple qui se prétendait moderne, une sorte de conformisme qui soudain les déséquilibre. Autour d'eux les préparatifs commencent, et les proches s'organisent. Comme Dimitri qui filme une à une les réactions de chacun, pour construire la vidéo qu'il projettera le grand soir. L'annonce du mariage va alors être l'occasion pour beaucoup de révéler la profondeur de ce qu'ils ressentent. Le père de Romain, révolutionnaire et revendicatif, la mère d'Augustin, catholique bouleversée par l'homosexualité de son fils, et bien d'autres encore. Les résistances morales vont bien souvent se confronter à l'amour filial, pour aboutir à une forme de vérité contemporaine.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La postface de l'album évoque de manière humoristique le mercantilisme d'un album de BD consacré au mariage pour tous. C'est l'appréhension que l'on peut légitimement avoir en abordant ce roman graphique, avec son titre-pitch très direct, et tout à fait dans l'air du temps. Mais les appréhensions tombent vite devant l'authenticité du propos et la qualité de la mise en perspective de cette histoire d'amour sur fond de loi Taubira. L'album alterne les séquences autour de Romain et d'Augustin, dans leur relation intime avant le mariage, et celles consacrées à leurs familles, leurs amis, qui réagissent, discutent et se préparent à l'événement. Les premières sont dessinées par Didier Garguilo, dans un style semi-réaliste à la ligne claire moderne, mettant en avant les visages très réussis de tous ses personnages. Sa narration use (et abuse presque) de plans fixes qui renforcent l'importance des dialogues et des silences entre les deux hommes. Son compère Joseph Falzon illustre en noir et blanc les séquences périphériques. Plus brouillonnes et en opposition de style avec les précédentes, elles sont aussi l'occasion des échanges les plus intenses sur le fond de ce que signifie le mariage gay. C'est dans ces détours que ce récit trouve parfois une certaine grâce, notamment lorsqu'il met en scène les plus conservateurs des membres de la famille d'Augustin, et le dilemme qu'ils vivent face à la perspective d'un bonheur que leur morale réprouve. Pour le reste, cette chronique sociale est aussi l'occasion de revenir sur la nature des débats qui ont eu lieu juste après le vote de la loi qui autorisait le mariage pour tous. Thomas Cadène propose un éclairage moderne plein de réflexions sur un problème sociétal souvent caricaturé par les médias. Il le fait sans lourdeur et en réservant de vrais moments d'émotion.