L'histoire :
« Chez Francisque » est un troquet où il est de bon ton de s’accouder au comptoir pour vider ses verres… et sa verve de facho. Morceaux choisis :
« Les pervers, faudrait leur couper les couilles ! »
« Ah non, c’est plus des pauvres qu’on a ! Ils sont trop gros, gras comme des milliardaires ! Dans le temps, on avait de vrais pauvres, chétifs, malades, ils sentaient bon la misère, on avait envie de donner ! »
« Le nerf de l’économie, c’est ni le patron, ni l’ouvrier. C’est nous, les petits-porteurs, qui prenons les risques ! Allez, je reprends une action Pernod-Ricard à deux euros ! »
« Je fume, si je veux ! Les fumeurs passifs, ils ont qu’à rester chez eux, comme les buveurs passifs ! Tu verras qu’un jour y’aura des zones non buveurs dans les bars ! »
« Le zoo de Vincennes, c’est en France. Et ben les chimpanzés ils sont pas français pour autant ! »
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cette fois, le dessin ne montre pas le talent de Manu Larcenet, mais ça n’est pas l’objectif de l’album. Le décor est on ne peut minimaliste : un simple comptoir de bar, une innocente horizontalité qui suffit à provoquer des frissons. Car accoudés à cet élément indispensable, fachos contre gauchos, pro-militaires contre maghrébins, défilent. Les premiers se vident de leurs aigreurs avec un populisme tellement commode… mais tous sont avant tout des pochtrons. Ils nous abreuvent de leurs répliques venimeuses, nous imposant avec une assurance incontestable leur vision étriquée de la France : si possible avec xénophobie et/ou égocentrisme. En bref, un florilège de chroniques de la haine ordinaire, comme ne les auraient pas reniées Pierre Desproges. Cet humour trash, souvent volontairement douteux et grinçant, n’est pas à placer entre toutes les mains. Lindingre nous avait déjà servi le cynique Jeunesse de France, qui retraçait les mésaventures de deux jeunes fachos totalement crétins. Il récidive à présent dans la même verve, avec un ixième degré provocateur, qui suscite le malaise, qui fait plus frémir que rire. Ici mises bout à bout, ces brèves de comptoir totalement réac’ font un peu surdose. Au mieux lassantes, au pire écœurantes. A lire à doses homéopathiques…