L'histoire :
C'est en tenue de clowns que deux hommes se présentent à l'entretien d'embauche pour devenir policiers. Pas si illogique, lorsqu'on s'apprête à passer en autre entretien, juste après, pour un parc d'attraction. Le commandant qui les reçoit trouve cette faculté d'adaptation intéressante : il les embauche sur le champs. Les deux zouaves se révèlent pour autant parfaitement incompétents pour le métier de policier. Incompétents, mais aussi limités sur le plan intellectuel, bourrés des préjugés racistes et populistes de base, sans aucune notion psychologique face aux victimes. Quand ils enquêtent sur une scène de crime, Roland goûte avec son doigt le liquide rouge qui sort du crâne transpercé d'un couteau pour vérifier qu'il s'agit bien de sang. Quand ils prennent la déposition d'une mamie pour vol de sac à main, ils lui reprochent d'aguicher le quidam en minijupe. Quand ils sont en planque de nuit dans une voiture banalisée, ils se divertissent en écoutant la musique tellement fort, que des voisins appellent les flics pour tapage nocturne. Quand ils repèrent deux jeunes sur le banc d'un square, ils cherchent à tout prix à les interpeller pour trafic de cannabis, alors que les ados révisent simplement leur contrôle de chimie. Quand une mère de famille s'inquiète de la disparition de son fils, ils lui laissent craindre le pire et lui conseillent de faire d'emblée d'autres enfants...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
C'est bien connu : les flics sont des incompétents cérébralement limités qui abusent de l'autorité naturelle de leurs costumes, avec une propension à la fainéantise, à la corruption et au corporatisme. Tel est le postulat de départ de cette parodie outrancière sur le beau métier de policier, en strips de gags de tailles variées (pleines pages, 3 cases, ou planches entières). Ici, un duo de héros plus proches de Laurel et Hardy que de Holmes et Watson incarnent des anti-héros délicieux. Un chauve boutonneux sans prénom et son copain moustachu Roland prouvent leur totale inaptitude à servir les forces de l'ordre – et par ailleurs toute autre profession, tant ils sont abrutis. Les ressorts comiques exploités par le scénariste Jorge Bernstein sont certes un peu faciles, mais exutoires pour quiconque s'est déjà retrouvé confronté à la rigidité que la profession exerce sur les rapports humains – et cet aspect n'est même pas parodique. Bernstein joue donc sur du velours souvent réitéré : le duo utilise le code pénal surtout pour taper sur les gardés à vue ; ils se servent de leurs talkie-walkie comme des gamins de 10 ans ; ils s'appuie sur leurs costumes pour abuser les citoyens ; ils comprennent tout de travers lors des dépositions ; ils ont une fâcheuse propension à protéger les coupables et à accuser les victimes. Le dessin stylisé et humoristique de Pluttark, alias Rudy Spiessert, fait le job, dans le registre ad hoc. C'est effectivement fun, même si un peu répétitif...