L'histoire :
Un petit bourg de Basse-Normandie, non loin de Paris. Là, la vie semble abîmée comme foulée aux pieds par la modernité. Les commerces en enfilades affichent tous des affiches promotionnelles avant liquidation. Les façades décrépies n’ont pas été ravalées depuis un bail. Seuls circulent encore les poids lourds et potins relayant le triste quotidien des quelques survivants de la ruralité française. En gros, la mort rode : tout doit disparaître… Pour Alicia et Sabine, ce lundi est jour de rentrée au lycée. Une rentrée morose, sans histoire ni grand intérêt, sinon que cette année, côté mecs, elles sont plutôt gâtées. Sabine surtout qui, souhaitant se rattraper après trop d’occasions manquées, a déjà repéré un petit nouveau très mignon venu de la capitale. Alicia, elle, ne se fait pas d’illusions sur son physique et préfère chambrer le paumé du coin, Dario, histoire de rigoler un peu. Leur vie suit son cours, d’un commun et d’un ennui coutumier d’une province endormie. Pourtant ce lundi donc, elles s’arrêtent au tabac, en sortant du bahut, pour acheter une revue branchée. La vendeuse, sympa, leur glisse alors quelques bonus gratis en prime. Elles viennent en fait de rencontrer Mélusine, une jeune fille d’un ou deux ans leur aînée, rebelle et ex-punk, tout de noir vêtue, qui deviendra leur amie et avec qui elles vivront des aventures géniales tout autant que sordides. Leur vie vient de basculer…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Apprêtez-vous à recevoir une claque dont vous vous souviendrez ! En cette fin d’année 2006, les éditions Futuropolis nous gâtent et cet album, un one-shot, en est la parfaite illustration. Graphiquement, ceux qui auront lu l’Empire des hauts murs (paru chez Delcourt) ne seront pas surpris : c’est du Simon Hureau tout craché, réaliste et enfantin à la fois (ce qui contribue sans doute au malaise...). Non, la surprise est ailleurs, côté scénario. Parce que rien ne vous aura préparé à cela. Tout doit disparaître commence comme une chronique sociale désenchantée, celle d’une ruralité française qui, n’y retrouvant plus ses vaches, les appelle désormais UGB (Unité Gros Bétail), sous le sigle de la modernité. Au sein de ce trou quelconque et perdu de Basse-Normandie, vampirisé par la capitale, reste cependant encore quelques embryons de vie. On y suit Sabine et Alicia, deux lycéennes a priori sans histoires. « A priori » car la rencontre avec leur aînée Mélusine va bouleverser leur petit monde, leur ouvrir des horizons jusqu’alors inconnus… Après une première partie passionnante mais classique, d’un coup d’un seul, la chronique vire au drame et sombre dans l’horreur pour ne plus laisser le moindre espoir. Une intrigue scindée en deux, comme si la première partie n’était là que pour mieux préparer un renversement si soudain et fantastique que, l’espace d’un instant, on ne peut y croire, on perd littéralement pieds, et l’on espère inlassablement un sursaut. Cependant la chute continue jusqu’à l’hallali... L’unique couleur sang de ce récit N/B, aurait du nous mettre la puce à l’oreille : il ne saurait y avoir aucune échappatoire. Tout doit disparaître : ni animaux, ni commerces, ni maisons, ni même habitants, il ne restera rien ! La mouette blanche est un charognard reconnu et elle figure en couverture… Un trip phénoménal, noir et lumineux à la fois.
