L'histoire :
Fin XIXe, dans un petit village de la lande du Daartmore (Angleterre)… Le fermier Thomas Jobson est tout fiérot d’être papa pour la seconde fois, d’un petit Peter. L’ainée, Sheela, âgée d’une dizaine d’années, le garde parfois durant les moissons, alors que sa mère Betty aide aux champs. Mais ce jour là, elle ne le lâche du regard que quelques minutes, le temps de cueillir des fleurs, et le bébé disparait. Elle alerte aussitôt ses parents et sa mère cède à un excès de violence dont elle est coutumière : cette sotte de Sheela a posé le couffin de Peter sous un aubépin, l’arbre des fées ! Ce sont elles qui l’ont forcément enlevé, on ne le retrouvera jamais ! Après 3 jours d’intenses recherches de tout le village, Peter reste effectivement introuvable. Une nuit de pleine lune, Betty procède donc à une incantation solitaire. 7 rubans, des herbes de Saint-Jean, 7 gouttes de sang… et la nuit suivante, des pleurs se font entendre sur le pas de la porte. Le bébé déposé n’est pas Peter, tous le savent, mais qu’importe : Betty fait « comme si » et c’est le principal. Quelques années plus tard, Peter, surnommé Scrubby, est un infatigable « vadrouilleur », à travers champs et forêts. Il se met un jour à poursuivre une sorte d’alter ego énigmatique et pénètre dans le Wistman’s wood, le bois interdit des sortilèges. Au milieu d’une végétation dense et obscure, il tombe nez à nez avec un vieil ermite, une sorte de druide appelé le « chasseur sauvage ». Le vieillard et l’enfant sympathisent…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Pierre Dubois, le scénariste de ce nouveau conte légendaire, s’est initialement fait connaître du public bédéphile en publiant La grande encyclopédie des fées. En conteur émérite, le plus célèbres des « elficologues » (il connait réellement des fées, parait-il !) nous livre ici les prémices d’une grande saga féerique. Celle-ci prend racine sous l’ère victorienne, tout d’abord en milieu rural, puis dans les bas-fonds de Londres. Evidemment, le contexte, le genre et le prénom du petit héros font immédiatement penser au Peter Pan de Régis Loisel. Nonobstant, la trame et le ton, certes empreint d’une agréable poésie, se détachent de cette référence. Pour le moment, Peter alias Scrubby, avale le monde, prend ses repères et commence à embrasser son destin exceptionnel. L’érudition et le talent de narrateur de Dubois sont tels que cette mise en bouche est captivante, même si elle ne montre pas une grande originalité de fond. Mais cette histoire ne fonctionnerait pas pleinement sans la touche artistique de Xavier Fourquemin, complétée des couleurs de l’inévitable Scarlett Smulkowski, un duo qu’on a découvert et apprécié l’année dernière dans Miss Endicott ! Le décorum n’est finalement guère différent pour le dessinateur, qui excelle une fois de plus dans cette esthétique historico-fantastique, paradoxallement lugubre et légère. Son style franco-belge semi-réaliste très abouti, pas très loin d’ailleurs du trait d'un certain Loisel, s’avère idoine à raconter les prémices de cette jolie légende, à ne pas louper !