L'histoire :
Dans les années 1980, alors qu'il a la trentaine, Vladimir Poutine est agent du KGB, l'aboutissement de son rêve d'adolescent passionné par les héros d'espionnage. Il n'est pas un officier supérieur, il doit se contenter de missions de surveillance sur le territoire russe. Mais une bagarre dans le métro de Moscou qui confirme un caractère trop impulsif ralentit sa progression. Il sera affecté à Dresde, en Allemagne de l'Est, pour assurer la liaison avec ses homologues locaux, surveiller les mouvements militaires américains... Rien de très prestigieux, des locaux plutôt minables. Il assistera à la chute du mur, et comment une mobilisation sans précédent a eu raison de la résistance des autorités politiques, pourtant toutes proches d'envoyer les troupes. Lorsque quelques années plus tard il est choisi pour remplacer un Boris Eltsine incapable de diriger son pays, tous les dirigeants occidentaux sont surpris. L'homme n'a pas d'envergure particulière, il a tout du fonctionnaire zélé et travailleur de l'ombre. Pourtant, ses expériences passées et son observation des évènements politiques autour de lui ont forgé sa vision du pouvoir et son ambition de retour de la Russie au premier plan. Et très vite, ses interlocuteurs vont découvrir une communication surprenante, imprévisible et terriblement cynique...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le contenu historique de cette sorte de biographie de la vie de Poutine est passionnant, bien séquencé et très instructif. On a la sensation de mieux comprendre d'où vient le despote. Et même si le secret sur sa personnalité reste épais, certaines de ses expériences ont visiblement construit sa vision du monde. Andrew Weiss a vécu aux premières loges certaines des rencontres internationales qu'il décrit. Il s'appuie sur une vraie connaissance de l'Union Soviétique et de la transition vers la Russie actuelle, qu'il a vécue en tant qu'universitaire, puis collaborateur de gouvernements américains. Graphiquement, Brian Brown se contente de mettre en scène les rencontres décrites pas le scénariste. Il semble évident que leur travail s'est fait indépendamment, mais avec pas mal de fluidité dans les enchaînements. Même s'il se contente d'illustrer des descriptions, Brown réussit à insérer des bouts de paysage sur la voix off, comme un reportage qui s'arrêterait sur des détails apparemment sans importance, mais qui donnent une toile de fond. Son style ultra simpliste et moderne est dans la lignée de la scène indé américaine. Le livre parait d'ailleurs simultanément aux Etats-Unis et en France. Ce travail au timing peut sembler opportuniste, mais il a en fait débuté bien avant l'invasion de l'Ukraine, et s'est achevé un mois après les premiers bombardements. Ce qui renforce d'ailleurs le propos de Weiss : les peurs, les frustrations et les ambitions du Tsar russe remontent loin dans son passé.