L'histoire :
Eva (l’aînée) et Nell (la cadette) sont sœurs. Elles habitent seules dans une maison en bois profondément isolée au fin fond d’une épaisse forêt. Leur père est mort d’un accident de tronçonneuse et leur mère d’un cancer. Elles vivent d’autant plus seule que… le monde civilisé s’est totalement effondré. Les (lointaines) villes sont laissées à l’abandon, aux squatteurs et aux pilleurs. A l’abri des arbres et des velléités diverses, elles se sont organisées en autarcie, notamment grâce aux nombreuses réserves de conserves que leur père a pris soin de confectionner avant son accident. Elles se chauffent au poêle à bois, boivent l’eau de source et s’éclairent à la bougie. L’électricité est ce qui leur manque le plus. Surtout à Eva, qui se destinait à une grande carrière de danseuse. Sans musique, il lui est très difficile de s’entraîner… En ce soir de Noël, elles se font des cadeaux : Nell a cousu des chaussons de danse à Eva ; Eva offre un cahier vierge (une denrée rare !) à Nell. Elles attendent dans leur coin que « ça reparte », en se faisant les plus discrètes possible. Un jour, Eva trouve un bidon d’essence plein ! Leur joie est de courte durée car elles se disputent quant à l’utilisation à en faire : profiter de quelques heures de groupe électrogène ou prendre la voiture pour s’approvisionner à la ville ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le roman éponyme de Jean Hegland a déjà été adapté au cinéma… mais seulement outre Atlantique (Canada). Voilà le best-seller adapté au sein d’une longue BD (156 planches) en noir et blanc et au dessin semi-réaliste aussi appliqué et détaillé qu’agréable, par Lomig. Dans ce récit d’anticipation post-apocalyptique ou plutôt collapsologique, l’écrivaine et son adaptateur empoignent à pleines mains la question du grand effondrement et du survivalisme. Deux frangines se retrouvent livrées à eux-mêmes au sein d’une maison isolée dans la forêt, après que notre « belle » civilisation occidentale et consumériste soit gravement partie à vau-l’eau. Ce qui est loin d’être un sujet anodin, à notre époque où tout fout le camp. Combien de temps peut-on subsister en pareille circonstance ? Comment s’organiser pour pallier aux besoins primaires ? A quelles réactions psychologiques faut-il se préparer en pareille situation d'isolement ? Bien évidemment, on ne déflore pas grand-chose du suspens en révélant que le titre prend tout son sens : la forêt joue ici un rôle équilibrant majeur. Elle s’avère à la fois protectrice, nourricière et apaisante. La narration a régulièrement recours aux flashbacks, sans gestion chromatique différenciée… mais on ne se perd pas en route pour autant. L’intrigue alterne les périodes d’angoisse, les moments d’espoirs, les crises, les séquences de tensions (et quelques scènes « chaudes », qui restent soft). Elle ne résout pas tout, mais pose néanmoins des questions essentielles sur la nature de l’homme et son statut de locataire de la Terre. Un propos au cœur de nos préoccupations actuelles…