interview Manga

Keito Koume

©Ototo édition 2013

Nouvelle pépite des éditions Ototo, Spice & Wolf est l’adaptation en manga d’une série de romans à succès au Japon. C’est Keito Koume qui la réalise, un jeune loup au travail hétéroclite qui dessine du hentaï épicé et du seinen en passant par du yuri, mais qu’on connaissait (comme le loup blanc ?) jusqu’ici surtout pour avoir été le character designer de plusieurs séries d’animations de la licence Queen’s Blade. Venu se jeter dans la gueule du loup en France à l’occasion de Japan Expo, nous avons pu le rencontrer pour une interview... au poil !

Réalisée en lien avec les albums Spice and wolf T1, Spice and wolf T7, Spice and wolf T6, Spice and wolf T5, Spice and wolf T4, Spice and wolf T3, Spice and wolf T2
Lieu de l'interview : Villepinte

interview menée
par
17 août 2013

Pouvez-vous nous raconter comment vous êtes devenu mangaka, et pourquoi ?
Keito Koume : Quand j’étais à l’université, je faisais mes études dans le but de devenir agent publique, mais j’ai échoué aux concours. C’est comme ça que, étant donné que je fréquentais un club de dessinateurs de manga amateurs à l’université, j’en suis venu à me réorienter vers le dessin après cet échec.


holo nue


Comment êtes-vous passé professionnel ?
Keito Koume : J’ai commencé par aller présenter mes dessins à un éditeur et j’ai été embauché par le mensuel de prépublication Wani Magazine-sha (qui édite des titres d’orientation ecchi et hentaï, NDR).


Quels sont les auteurs qui vous ont influencé ou marqué, qui vous ont donné envie de faire ce métier ?
Keito Koume : Yoshitô Asari, l’auteur du manga Lucu Lucu (non traduit en France, mais on le connaît par contre pour Manga science chez Pika et Sky of Weiss chez Milan, NDR), un petit manga très humoristique très japonais (publié dans le magazine Afternoon, NDR). Il y a aussi les CLAMP, et Takashi Shiina, l’auteur de Zettai Karen Children (édité en France chez Kana, NDR).


bonjour


Spice & wolf est à l’origine une série de romans : connaissiez-vous ces livres avant de travailler sur le projet d’adaptation manga ? Les avez-vous lus ?
Keito Koume : J’ai lu le roman car beaucoup de mes connaissances étaient déjà fans, donc moi aussi j’ai fini par le lire avant même de travailler sur le titre.


Comment êtes-vous arrivés sur le projet ? La demande est venue de votre éditeur, de l’auteur des romans... ?
Keito Koume : Ca ne vient pas de moi à la base, cela vient de mon éditeur qui travaille en freelance, M. Kentaro Ogino. C’est quelqu’un pour qui j’ai beaucoup de gratitude. Il m’a présenté ce projet et j’ai fini par accepter après avoir néanmoins décliné l’offre. Au début, je pensais refuser car j’étais assez peu confiant, j’avais peur de ne pas réussir un projet comme celui-là. Mais finalement, ça se passe plutôt bien.


le mangaka en plein travail


Allez-vous adapter tous les livres de la série ? Il y en a 16...
Keito Koume : Je ne sais pas, ce serait un peu difficile car cela risque de faire énormément de travail et de s’étaler sur longtemps pour adapter tous les volumes. Les mangas très longs sont relativement rares. Le problème, c’est que la popularité, si elle baisse, peut entraîner l’arrêt de la série. Mais moi et beaucoup d’autres gens voulons savoir ce que deviendront les héros Lawrence et Holo, donc en ce qui me concerne, j’aimerais bien pouvoir continuer. Mais j’imagine que ça va être difficile d’adapter les 16 volumes, et il y a des chances que cela s’arrête avant...


Avez-vous rencontré l’auteur des romans, Isuna Hasekura ? Travaillez-vous avec lui pour l’adaptation en manga ?
Keito Koume : Oui, je l’ai déjà rencontré. En revanche, pour ce qui est de l’adaptation en manga, on ne travaille pas vraiment ensemble. J’ai accès par le studio qui a fait la version animée à tout ce qui est storyboards, illustrations, ce genre de choses-là, mais je n’ai pas l’auteur en relation pour l’adaptation. Par contre, je sens en quelque sorte comme une présence qui me regarde quand je travaille, « l’œil de dieu » (rires).


course


Le fait que la série d’origine est connue et a gagné une récompense, cela vous apporte une pression supplémentaire ? (L’auteur des romans, Isuna Hasekura, a gagné pour son n°1 la 2ème place au 12ème prix littéraire « Dengeki Shōsetsu Taishō » en 2005).
Keito Koume : On ne peut pas vraiment dire que cela m’ait apporté de la pression. En fait, ça me passe un peu au-dessus. Par contre je ressens une grande fierté d’avoir pu adapter un titre comme celui-là.


Etes-vous libre d’adapter les romans comme vous le désirez ou êtes-vous très encadré ?
Keito Koume : Je suis relativement libre de faire des changements si c’est nécessaire. En revanche, une chose sur laquelle l’auteur original ne veut pas qu’il y ait de modification, c’est par rapport au caractère et aux attitudes de Holo. Le design des personnages principaux vient quant à lui des illustrations présentes dans les romans (réalisées par Jû Ayakura).


Quel est le ratio que vous avez choisi pour l’adaptation des romans au format manga ?
Keito Koume : Jusqu’ici, un volume du roman d’origine s’étale sur l’équivalent louve de trois mangas, mais je vais changer un peu pour que cela avance plus vite, et que maintenant deux volumes du manga fassent l’équivalent d’un roman à un roman et demi.


Holo est rarement montrée sous sa forme de loup : aimeriez-vous la dessiner plus souvent comme cela ? Cela donne des planches impressionnantes...
Keito Koume : J’aime bien la dessiner quand elle est grande, en loup, mais si je ne le fais pas plus souvent c’est simplement car l’histoire ne le permet pas. Personnellement, j’aimerais effectivement la dessiner comme cela plus souvent à côté de Lawrence, qui est le personnage que je préfère. Si j’en avais l’opportunité, je le ferais, mais je dois suivre le déroulement de l’histoire...


Certains de vos anciens mangas sont beaucoup plus érotiques. Aimeriez-vous mettre plus de scènes sexy dans Spice & Wolf ?
Keito Koume : Disons que j’aime bien faire Holo un peu sexy, mais il n’en faut pas plus, il ne faut pas que ce soit avec un sex appeal démesuré. Le personnage doit être juste aguichant, attirant, adorable, mais il ne faut pas aller plus loin que cela.


panier


Dans le manga, les villes, les objets, les décors, sont très réalistes : avez-vous beaucoup de documentation sur le moyen-âge ?
Keito Koume : Oui, je me suis un petit peu renseigné, j’ai lu quelques ouvrages de référence sur cette époque et des choses en rapport avec le récit, je me suis référé à ce qui existait déjà avant, à ce que décrivait l’histoire... Pour l’aspect visuel, ce sont des livres avec beaucoup d’images, beaucoup d’illustrations... Je n’ai pas spécialement passé des journées entières là-dessus, mais je me suis un petit peu renseigné en effet...


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Que pensez-vous du succès de Spice & wolf en France ?
Keito Koume : Je n’imaginais absolument pas que la série sortirait en France, c’est une vraie surprise. Je remercie le public français d’accueillir aussi bien mon manga.


salut Si vous aviez le pouvoir de visiter l’esprit d’un artiste (mangaka ou pas, vivant ou pas) qui choisiriez-vous et pourquoi ?
Keito Koume : J’ai déjà répondu il y a quelques temps à des questions qui ressemblaient beaucoup à celles d’aujourd’hui, mais je ne me souviens plus des réponses que j’avais données à l’époque. Le travail m’accapare trop (rire). Par contre, pour celle-là, cela va demander un peu de réflexion (rires !)... Je suis un grand fan de Carl Sagan, un scientifique américain qui parle beaucoup du cosmos, et qui aime beaucoup populariser ce genre de sujets scientifiques. J’aimerais bien connaître ce qu’il pense et comment il le pense...



Merci !


dessin original




Merci à Stéphane Tranchemer pour la traduction et aux éditions Ototo, notamment à Guillaume


Toutes les illustrations de l'article sont ©Keito Koume
Toutes les photos de l'article sont ©Nicolas Demay