L'histoire :
Au début du XVIème siècle, en terres persanes, Priti est une orpheline de 20 ans vivant au sein de la communauté jaïn. Elle a suivi une formation en arts et son grand talent lui vaut aujourd'hui d'être repérée par le Nazir Nadim Khan, le grand eunuque de la reine Nur Mahal. Le grand Mogol finance en effet son école, afin de repérer de nouveaux artistes capables de glorifier son nom. Elle n'a donc d'autre choix que d'accepter l'invitation qui lui est faite de rejoindre la cour de Jahangir, malgré leurs grandes divergences idéologiques sur la vie. Par exemple, les jaïns sont une communauté hindoue végétarienne, tandis que les gens de Jahangir, des musulmans, mangent de la viande. Dans les jours qui suivent, Priti est donc conduite jusqu'au Zenana d'Agra, une gigantesque forteresse qui est également le siège de la cour de l'empereur Jahangir. Elle y est accueillie par Nadim Khan, qui la confie à Aqa, la vieille surintendante du harem. Le lendemain, Aqa lui fait une visite guidée du zenana, enceinte dédiée à l'étude, et lui en explique toutes les subtilités et l'importance des protocoles. Elle apprend notamment le pouvoir des femmes, découvre la cruauté des sanctions, manque de défaillir la vue des cuisines emplies de bêtes tuées et fait connaissance avec Ahmindra, un moine jaïn...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après 10 épisodes de Djinn (qui comptera 12 tomes) aux côtés de Jean Dufaux, la dessinatrice Ana Miralles rempile aux côtés de son époux Emilio Ruiz pour une série relativement similaire dans son genre (et qui comptera 4 tomes). A la suite d'une jeune et gracieuse héroïne, la peintre Priti, les auteurs nous promènent au travers des moeurs et des protocoles à la cour de Jahangir, empereur indo-perse du XVIème siècle. Dans ce contexte très codifié, Priti devra y réaliser un « murraqa' », c'est à dire un patchwork de tissus à la gloire de l'empereur. C'est d'ailleurs ce type de relique qui est, chez le couple, à l'origine de cette envie de série. Le scénario de Ruiz est bien entendu une fiction, mais il s'appuie sur un contexte historique authentique, crédible et délicieux. L'imposante bibliographie annexée en fin d'album accorde beaucoup de crédit à la retranscription de cette civilisation, dont les rouages sont à des années-lumières de notre société contemporaine. Pour le moment, le récit se contente essentiellement de planter le contexte, sans encore tisser d'intrigue (de mœurs) à proprement parler. L'élégance des dialogues, la retenu des personnages, en dépit de sorts parfois cruels (la femme enterrée), font la part belle à une société éclairée, progressiste, malgré un étonnant pluralisme de religions et de rites. Surtout, cette minutieuse étude de société ne serait rien sans le dessin somptueux de Miralles. Aux confins de l'érotisme, ses personnages (féminins, surtout) rivalisent une nouvelle fois de volupté, de sensualité et de grâce. Pour satisfaire les mirettes de ses nombreux fans, Miralles apporte un soin tout particulier aux vêtements, bijoux, décors et architectures orientaux (quelle couverture !). La grande classe !