L'histoire :
Tandis que des cueilleuses s’emploient à récolter dans un champ pentu, elles assistent au crash d’un aéroplane à proximité. Le pilote s’en extrait, un peu groggy, et il est soigné par les shamans du village de Lapyoza. Lorsqu’il reprend connaissance, on lui explique qu’il se trouve au Sud de la péninsule caspézienne, pas du tout là où il croyait être. Il annonce s’appeler Pavil et être un scribe envoyé par l’empire dans la région de Vernon pour régler un contentieux administratif. Hélas pour lui, la région est autonome, isolée, et le prochain bateau qui pourra le ramener à sa civilisation ne passera que dans plusieurs mois. Après concertation, les sages lui proposent de l’héberger, à condition qu’il se conforme aux règles et qu’il participe à la vie du village. Pavil découvre alors le quotidien de cette petite ville nichée dans un relief accentué et lacustre, composé d’îles accidentées, de passerelles, de maisons sur pilotis, de temples et de palais antiques. Il met une bâche sur son avion, s’installe dans la chambre qu’on lui attribue et accepte un poste auprès d’un vieux cuistot qui lui apprend la gastronomie locale…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cette aventure imaginaire, aux frontières de la science-fiction et de l’anthropologie, est parfaitement en phase avec le catalogue des éditions 2024. Jeremy Perrodeau, l’auteur de Crépuscule et de Le long des ruines, reprend sa thématique de prédilection : les ruines d’une civilisation différente et si proche à la fois de la nôtre. Autre base analogue à ses précédentes œuvres : un agent « s’échoue » en ce lieu contrôlé par un peuple plus archaïque que le sien, en marge d’un empire que nous ne verrons jamais. Il s’immerge alors dans les rites, tente d’en comprendre la culture et surtout, joue les espions infiltrés pour tenter de percer le secret d’artefacts protégés par le dogme religieux en place. Le récit est riche en paraboles, notamment sur le culte que nous vouons à nos antiquités, voulues fondatrices de nos propres civilisations et auxquelles on accorde généralement une adoration disproportionnée. Cet axe est similaire au veau d’or dans l’exode des hébreux emmenés par Moïse (Premier testament). Mais en marge de ce propos et de la grande cohérence d’une civilisation imaginée de toutes pièces (dont en sent les inspirations venues d’Asie et d’Océanie), on ne voit pas très bien où veut nous emmener l’auteur. Au cours du parcours initiatique et linéaire de son héros infiltré, Perrodeau nous abandonne sur une fin énigmatique et ouverte. Un peu facile ? Le dessin stylisé est en revanche bien en place, très dépaysant dans ses vues panoramiques… mais complété par un système de colorisation terne, en 2 ou 3 teintes (jamais plus) fades en aplats qui écrase un peu les profondeurs.