L'histoire :
La salle où se tenait encore il y a peu le magicien venu d’Egypte est à présent vide. Abandonnés en toute hâte, les sièges gisent éparpillés en bataille. Un pesant silence règne. Aujourd’hui, seuls quelques uns survivent tant bien que mal, attendant leur fin, et très peu se souviennent des débuts de cette fin prochaine. Tout commença lors d’une période de troubles politiques et sociaux. Le marasme économique aidant, la tension était générale. Les grèves et manifestations occupaient le pavé et la rue grondait. En ville, des avertissements et prophéties, comme des murmures, circulaient. On disait que le pêché des hommes avaient conduit la Terre à sa fin. Signe des temps, le climat se déréglait, faisant fi des saisons, et l’on annonçait le règne prochain de forces telluriques et inconnues. C’est alors que Nyarlathotep survint d’Egypte, débarquant au cœur de la civilisation urbaine occidentale. Devant lui, les fellahs se prosternaient, tel Pharaon. Chaque soir, l’homme remplissait les théâtres. On venait l’écouter parler science, parler magie. Surtout, on en repartait frémissant de terreur car la rumeur voulait que nul qui assista à l’une de ses représentations, plongeait à jamais dans un profond cauchemar…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Nyarlathotep est un cauchemar dont il est difficile de saisir la fin. Pour comprendre cette nouvelle tirée de l’œuvre d'H.P. Lovecraft, il faut lire la lettre figurant très justement en fin d’album. Elle vous donnera des clefs de lecture avant de re-parcourir un titre ô combien énigmatique. Attention cependant, cette missive est une postface ! Il serait sans doute préjudicieux de déflorer un trip originel si fantastique. Car bien sûr, le ressort de ce récit narré de bout en bout en voix « off » repose sur une réalité déformée. A partir d’inquiétudes sociales contemporaines, Lovecraft (et Rotomago donc) développe(nt) un scénario surnaturel, « terrific », horrifique ! C’est en effet à une descente aux enfers qu’il(s) nous convie(nt), soulevant de multiples interrogations sans pour autant souhaiter y apporter de réponses… Alors pourquoi lire ce fantasme éveillé, surfant sur la faveur alors ambiante (début XXe et toujours actuelle) pour l’Egyptologie ? Parce qu’il fascine ! A cela, les planches signées Julien Noirel ne sont pas étrangères. Publié judicieusement sous un format extra large, Nyarlathotep séduit par ses pleines pages surlignées, chaudes, sombres, en un mot : subliminales. La couverture promet l’hiver d’un monde, il ne tient qu’à vous de le découvrir. Un bel objet en somme qui vous sauvera peut-être (l’approche rédemptrice étant prégnante) et ne dépareillera nullement dans votre bdthèque.