L'histoire :
Gianna se répète à elle-même quotidiennement qu'elle est normale. Car c'est dur d'être réellement différente en société. Elle vit en Italie, en 1977, année où des manifestations étudiantes commencent à faire du bruit près de Bologne. En arrivant dans son université, elle entend les mauvaises langues qui la regardent et la dénigrent. « Tiens, voilà la petite salope » ou « C'est la fille dont tout le monde parle ». Pourtant, malgré ce climat tendu, Gianna refuse de ne pas être la personne qu'elle veut être. Elle décide de s'impliquer dans les manifestations pour le droit à l'avortement et l'égalité pour tous. Toujours très proche des hommes, les femmes de sa génération la détestent tout en la jalousant secrètement. Quant aux hommes, ils éprouvent du désir pour Gianna, ils lui font des avances et ne peuvent la quitter du regard. Et les personnes d'un âge plus avancé ne comprennent pas son militantisme et ses idées : ils conservent une vision étriquée et archaïque de la place de la femme. C'est dans cet environnement que se débat Gianna pour vivre comme elle l'entend, en effectuant des petits boulots, et en refusant de brider sa sexualité pour entrer dans les normes. Mais la vie que mène cette étudiante ne sera pas au goût de tout le monde. Et elle aura énormément de mal à se faire accepter par la société...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Gianna sait qui elle est, mais la société lui interdit d'être réellement cette personne. Elle veut militer pour plus d'égalité, pour le droit à l'avortement, elle veut plaire à des hommes et vivre une sexualité épanouie, libérée. En tentant d'être elle-même, elle se sait jugée de façon très péjorative par tous ceux qui l'entourent, qu'ils soient hommes ou femmes, de sa génération ou non. Tous auront une bonne raison de lui trouver des torts et des travers. Pour son premier roman graphique, la jeune autrice italienne Arianna Melone livre un récit poignant et saisissant sur une jeune étudiante militante féministe, qui veut faire bouger les lignes, et qui tentent d'appliquer ses croyances dans son quotidien. Elle aura beaucoup de difficultés à y parvenir, car sa différence dérange, et elle ne rentre pas dans les codes préétablis par une société patriarcale qui domine les femmes, leurs corps et leurs esprits. Gianna, elle, ne rêve que de liberté, d'égalité. Le graphisme, coloré, apporte de la douceur au scénario très dur et sombre. Cet équilibre est appréciable, car certaines situations sont aussi dures à affronter pour nous, lecteur, que pour Gianna dans le récit. La fin est d'ailleurs l'apothéose du scénario et nous laisse un goût amer... Une histoire ancrée dans un passé proche, mais dont les combats sont pourtant toujours d'actualité. Preuve en est que le chemin risque encore d'être long pour réussir à atteindre l'égalité hommes-femmes, et que d'autres Gianna seront, d'ici-là, de nouveau victimes de la société.