L'histoire :
A la fin de l’année 1944, le lieutenant Hamada de la flotte aéronavale de la Marine Impériale japonaise atterrit en catastrophe sur le tarmac de la base de Taïwan. Son aile est en feu et son coéquipier n’a pas survécu. Le vice-amiral Takijiro Onishi l’accueille avec respect ; sa petite fille Riko lui saute dans les bras. Or Riko n’a rien à faire dans cette zone militaire ! Elle a une nouvelle fois écouté en cachette ce qui se passait sur le poste la radio de la base et elle a eu très peur pour son papa. Le vice-amiral Onishi est indulgent et il demande à Hamada de l’accompagner à Tokyo la semaine suivante, où doit se tenir une réunion capitale pour la suite des opérations. Il a besoin d’un pilote expérimenté, qui puisse faire un compte-rendu réaliste des combats auprès de l'état major. Car les japonais voient bien que les américains sont en train de gagner du terrain sur le front du Pacifique. Ils cherchent un nouveau souffle… Or, tandis qu’Onishi et Hamada discutent, la petite Riko se faufile malicieusement sous la taule d’un hangar et découvre d’énigmatiques piles de caisses en bois, par centaines. Dans l’une d’elle entrouverte, elle s’empare d’un énorme œuf vert foncé, strillé de nervures jaunes. Elle est surprise là par Onishi, qui lui raconte une légende : ce sont les larmes fossilisées du dernier dragon ! Riko ne sait pas trop à quoi s’en tenir. Onishi lui fait peur, cette histoire lui fait peur… Quelle est donc cette puissante arme secrète zoologique avec laquelle Onishi la laisse repartir chez elle ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le film culte de Joe Dante (1984) a imposé dans la pop-culture une bestiole aussi mignonne, sous forme de mogwaï, que redoutable une fois transformée en Gremlins. Une réplique du film explique vaguement le terme « gremlins », qui correspond à un parasite dans les moteurs venu d’Asie, légendaire dans l’armée américaine, à éradiquer. Le scénariste David Hasteda pousse ici le curseur jusqu’aux origines fantasmées de ces gremlins. Tout comme les nazis exploraient sur le front européen divers pistes d’armes paranormales (revoyez les Indiana Jones !) pour renverser le cours de la seconde guerre mondiale, voilà donc notre armée japonaise de 1944 qui a trouvé et cultivé des œufs de gremlins (mais on ne sait pas comment). Et qui les fourre dans ses avions destinés à se crasher en kamikazes sur les bâtiments américains, afin que les bestioles éclosent en vol, puis gangrènent l’US Airforce (si elles survivent aux crashs…). C’est pour le moins capillotracté, comme pitch. Dommage, car de nombreux focus sur la culture nippone prouvent une certaine érudition, via des renvois à un index final. Si on accepte la tonalité pulp de série B, avec toutes ses incohérences et ses facilités, nous suivons donc cette tentative foutraque de renverser le cours de la guerre du Pacifique au travers d’un vaillant kamikaze et de sa gentille famille, évidemment menacée bien en amont de l’ennemi par ces monstres sanguinaires. Le dessin de Guillaume Leblanc (et la colorisation de Feilyn) est hybride, dans le sens où il mélange les influences manga, comics et franco-belge, avec beaucoup d’application et de précision dans sa veine semi-réaliste, et d’efficacité dans son découpage et son rythme narratif. Quelques proportions / profondeurs ne sont toutefois pas totalement réussies et quelques faciès trop systématiquement grimaciers peuvent agacer. On note aussi un chara-design de la bestiole Gremlins qui se détache du modèle de Joe Dante pour ressembler à un petit démon mâtiné d’Alien très nerveux et tout aussi carnivore. Quelques scènes bien gores réservent cet album aux grands adolescents.