L'histoire :
Par une sombre nuit d’hiver et glaciale, une femme dépose un bébé devant la maison d’un vieux joueur de shamisen, un instrument traditionnel à cordes japonais. Découvrant une enfant au pied de son âtre, l’homme décide de lui donner le nom d’Haru et de l’adopter. Quelques années plus tard, la jeune fille est devenue une goze, c’est-à-dire une musicienne itinérante qui voyage de régions en régions pour apporter de la distraction dans les zones rurales du Japon d’alors. Après avoir joué dans un petit village et touché en plein cœur les habitants par son art et la beauté de son chant, Haru décide de reprendre son chemin et s’aventure en forêt. Là, elle y croise le kappa, une créature qui a récemment enlevé des enfants et pillé le village. Même aveugle, Haru décèle en lui sa colère et la douleur du rejet qu’il subit depuis toujours. Très vite, le kappa est séduit et bouleversé par la musique de la jeune fille qui prend le temps de jouer pour lui, et lui seul. À la fin du récital, le kappa est littéralement transformé et songe à laisser rentrer les enfants chez eux et s’excuser auprès de tous ceux qu’il a blessés. Cet instant avec Haru symbolise pour lui la fin de ses attitudes de bassesse et marque le début d’une nouvelle existence. Visiblement touché et ému par le don de la goze, le kappa décide de la remercier en lui offrant la clé de la dimension divine. Haru va alors reprendre son chemin et rencontrer les protagonistes emblématiques du folklore japonais...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Si la culture du Japon a depuis longtemps traversé nos frontières et s’est installée durablement dans notre paysage culturel, force est de constater que le folklore nippon est encore méconnu de par chez nous. De fait, le duo Tiago Minamisawa (scénario) et Guilherme Petreca (dessins et scénario) nous le fait découvrir par la lorgnette d’un conte directement inspiré de la vie d’Haru Kobayashi, une célèbre musicienne de shamisen (une sorte de guitare traditionnelle). Pour ce faire, l’équipe créative propose une ballade onirique et explore pêle-mêle les thèmes de la beauté et de la liberté à travers l’art, tout en faisant découvrir aux lecteurs un pan de la riche culture japonaise. Ainsi, on y (re)découvre les yokaï, ces divinités japonaises qui viennent accompagner ou troubler Haru au fil de son parcours de vie. Le sens du détail est scrupuleux et le récit documenté. Du côté des dessins, Guilherme Petreca colle parfaitement à la culture nippone avec des dessins à l’aspect aquarellé, directement issus du ukiyo-e, un art traditionnel japonais de culture sur bois. En effet, certaines de ses planches s’apparentent parfois à des tableaux qui forcent le respect. Véritable invitation à la contemplation et à la découverte d’une culture ancestrale, Shamisen est une œuvre qui se découvre autant qu’elle se lit. Derrière le contre folklorique, les auteurs ont su insuffler à leur œuvre une ambiance onirique et philosophique qui appelle à la méditation.