L'histoire :
Trenchfoot est une petite bourgade du fond de la Louisiane, qui tire son nom d'un docteur sadique de la Première Guerre Mondiale qui prenait un plaisir malsain à trancher les pieds des soldats qui avaient contracté la gangrène à force de patauger dans la boue. C'est dans ce bled que vit Sid. Sid est un redneck de la pire espèce, fruit d'un viol, qui vivote comme il peut au côté de ses semblables édentés, dépendants du crack et d'une pauvreté absolue. Pour gagner un peu d'argent, il mise sur des combats de chiens clandestins et des combines ici et là. Après avoir été rossé par des gars qu'il a essayé de rouler, Sid trouve par terre le portefeuille de l'un d'eux avec un ticket de loto. Arrivé au Juke Joint pour se noyer dans l'alcool, il découvre avec stupeur qu'il possède le ticket gagnant du tirage du mega loto : il est donc millionnaire ! Mais la nouvelle fait vite le tour du bar et très vite, les frères Reeb sont à ses trousses pour récupérer le précieux ticket. Sid va devoir se débarrasser d'eux s'il veut toucher le magot...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dès les premières planches de Trenchfoot, le lecteur se retrouve vite en terrain connu dans l'univers de DoogyBags. Inutile de dire que l'ambiance va être plutôt malsaine et que le duo Mud et Ghisalberti va s'en donner à cœur-joie dans la surenchère poisseuse au travers d'un décor de Louisiane en proie à la pauvreté la plus extrême. Et c'est dans un mélange de drogue, de sexe, de violence et de stoner qu'on suit les aventures de Sid, redneck et anti-héros par excellence qui se retrouve propulsé millionnaire après avoir volé un ticket de loto gagnant. Mais loin de tout flamber, le jeune homme végète dans Trenchfoot et attire la convoitise de tous les paumés du coin. Derrière cette histoire qui rappelle parfois Fargo des frères Coen, tant les petits choix du héros ouvrent la voie à des conséquences sanglantes sans demi-mesure ! Bref, Mud part dans tous les sens ; et force est de constater qu'on se laisse vite prendre au jeu dans cette histoire complètement décérébrée... De son côté, Nicolas Ghisalberti possède un trait un peu particulier qui colle parfaitement à l'univers de DoggyBags et plus généralement aux œuvres issues du Label 619 mais qui pourront en rebuter plus d'un, notamment à cause d'une colorisation crue avec des teintes jaunes, bleues ou mauves qui rajoutent volontairement une touche craspec à l'ensemble. De plus, la mise en scène des plans reste parfois un peu trop brouillonne pour offrir une lecture fluide. Mais rien de rédhibitoire, dans la mesure où la partie graphique colle à l'ambiance crasse de la Louisiane dépeinte par Mud. Au final, Trenchfoot permet une incartade avec un plaisir coupable dans une Amérique profonde, pauvre et sale au travers de laquelle il est impossible de s'en sortir... même lorsqu'on gagne 1 million de dollars au loto !