L'histoire :
Bruxelles, 1943. Kathleen a 12 ans et sa ville est occupée par les allemands. Elle ne comprend pas grand-chose à la guerre, sauf qu’elle ne devait pas répéter à l’extérieur ce qui se disait à la maison. Même au lycée, il fallait se méfier : on ne sait jamais qui pense quoi. Sa mère était vendeuse au rayon chapeau de l’Innovation : elle travaillait dur et déployait beaucoup d’efforts pour rester élégante malgré les restrictions. Son père Fernand tenait une aubette à journaux place Brouckère. Entre deux clients, il lisait toutes les gazettes, même celles des collabos. Il disait qu’il valait toujours mieux connaître ses ennemis. Mais ce qu’il préférait, c’était les histoires dessinées. Il lisait chaque semaine Spirou et Bravo ! Il dévorait les aventures de Tintin dans le petit vingtième. Il était fan d’Hergé. Son père était incollable sur les héros de bande dessinée et passait des heures à lui raconter leurs histoires. Sa mère était moins enthousiaste. Elle se moquait souvent de son mari en disant que c’était un grand enfant et que toutes ces bandes dessinées n’étaient plus de son âge…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après avoir suivi les aventures de l’hôtesse de l’air Kathleen Van Overstraeten lors de l’exposition universelle de 1958 et la décolonisation du Congo en 1960, on fait un bon arrière pour la retrouver en 1943, alors qu’elle n’est encore qu’une adolescente. C’est donc sous l’occupation de la Belgique par les allemands et les bombardements alliés que nous allons découvrir une partie de son histoire familiale. L’intrigue de cette histoire tragique est inspirée de faits historiques : un proche du père de Kathleen va utiliser son talent de dessinateur de bande dessinée pour entrer en résistance. Quelques belges vont entreprendre d’éditer et de distribuer un faux numéro du quotidien Le Soir où les collabos, les allemands et les nazis y sont raillés. Evidemment, cet affront fait aux allemands ne sera pas sans conséquences pour leurs auteurs. C’est donc une immersion dans un Bruxelles à l’atmosphère irrespirable à laquelle nous sommes conviés avec des serviteurs zélés des occupants, des adolescents qui se déchirent pour des raisons politiques qui leur échappent ou encore un quotidien pesant avec le rationnement alimentaire et les contrôles d’identité réalisés par les allemands. La BD et la presse sont au cœur de ce récit et le père de Kathleen va notamment échanger avec Hergé et Edgar P. Jacobs. Si, à cette époque, la BD est encore perçue comme un divertissement pour enfants, elle sera également une échappatoire pour certains et un moyen d’expression contestataire pour d’autres. Comme dans les précédents albums, les auteurs se sont documentés avec beaucoup de sérieux sur le contexte historique, ce qui a le mérite d’asseoir la crédibilité du scénario et son intensité. Le graphisme s’inscrit dans la tradition de la ligne claire avec un dessin académique particulièrement réaliste.