L'histoire :
Dans un appartement de Tokyo, se joue un drame familial. Un père violent corrige sa fillette à coup de baffes et la tue, involontairement. Son petit frère, qui jouait avec elle en portant un masque de théâtre Nô, découvre son cadavre ensanglanté et reste profondément choqué. 20 ans plus tard, à Paris, un mystérieux justicier masqué fait le « ménage » dans la vermine en tuant des violeurs et des dealers. Les médias et la police se perdent en conjectures sur ses intentions et ses motivations. Ce personnage controversé est surnommé Nô, en raison du masque qu’il porte sur son visage. La commissaire Jih, mère célibataire au tempérament musclé, est en charge de l’enquête. Elle envoie les corps à l’autopsie et examine circonspecte une vidéo du justicier, filmé à son insu de manière providentielle. Cependant, elle a aussi en charge l’enquête sur un serial killer surnommé l’égorgeur, qui en est à sa sixième victime. Son ministre de tutelle s’impatiente et exige des résultats. Elle et ses hommes s’interrogent : Nô va-t-il s’attaquer à l’égorgeur ? C’est alors qu’elle a l’occasion fortuite d’avoir Nô dans le viseur de son révolver. Ce qu’il lui révèle à ce moment est surprenant…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
En dehors des circuits traditionnels de l’édition BD, Nô est un thriller en one-shot édité sous le label indépendant Atypique. Dans son intention, cette maison d’édition promet de concasser les schémas narratifs classiques et manichéens, pour toujours livrer des rebondissements de récits frais et inattendus. C’est bien le cas avec cette histoire de justicier et de serial-killer qui ne ressemble à rien de connu dans son développement. Certes, on sent nombre d’influences mélangées et entremêlées du genre dans le scénario de Nicolas Lebra. On pense notamment à Dexter (qui ne tue que des méchants), au Silence des agneaux (le détraqué qui séquestre) ou encore aux films Halloween (pour le port du masque inexpressif et livide, tel celui du théâtre de Nô). Evoluer en dehors des sentiers battus est clairement un atout, car le fil atypique donne envie de tourner la page pour savoir où on va atterrir à la suivante. En l’occurrence, cette intention révèle aussi ses limites. Notamment en matière de cohérence dans les actes (avec des situations trop bizarres pour être crédibles), dans la psychologie des personnages (aux comportements basiques… et parfois outranciers) et elle ne s’affranchit pas pour autant complètement de nombreux clichés. Il en va de même avec le dessin de Tyef, qui s’appuie sur de bonnes bases semi-réalistes encrées et un certain savoir-faire pour varier la mise en scène et les effets de cadrages cinématographiques… mais qui se montre encore irrégulier, arythmique par moment, hésitant entre le registre caricatural et réaliste, parfois bancale dans le respect des proportions. Bref, il faut considérer Nô comme un premier album travaillé et intéressant quoique imparfait, qui révèle des intentions fort prometteuses !