L'histoire :
En mai 2020, en plein confinement, un chantier est en cours sur la voie ferré escarpée qui longe la Côte bleue, entre Carry-le-Rouet et l’Estaque, à proximité de Marseille. Il s’agit de restaurer les portions de voies dégradées par le temps, de dégager les amoncellements qui menacent de bloquer les voies, de sécuriser les parois contre les éboulements futurs, bref, de prolonger et préserver l’exploitation ferroviaire de cette ligne commerciale. Evidemment, ce chantier ne peut se dérouler que la nuit, tandis que la circulation des trains est moindre. Il faut notamment attendre le feu vert des gens qui travaillent à la régulation du trafic. Cernal le chef de chantier et Lucille la conductrice des travaux, est un duo expérimenté de travailleurs de la nuit. Ils dirigent leur équipe tel un orchestre de travailleurs de chantier où chacun a son rôle. Chaque nuit, ils doivent amener sur place des engins de chantiers extraordinaires et mixtes, c’est à dire qui peuvent à la fois utiliser des roues pneumatiques pour les chemins et les routes, mais aussi des jantes adaptées aux rails pour se déplacer sur les voies. Puis à l’aube, alors que les voies sont rendues à la circulation, il faut à chaque fois « inventer » l’endroit sécurisé où les garer jusqu’au lendemain, sur une zone escarpée et rocailleuse…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cet album de bande dessinée est adapté d’un reportage vidéo éponyme, réalisé par Marie Picard et Quentin Sixdeniers et commandité par NGE (Nouvelles Générations d’Entrepreneurs). Les deux projets (vidéo et BD) ont pour ambition de souligner le chantier de rénovation de la ligne ferroviaire de la Côte Bleue, entre l’Estaque et Carry-le-Rouet. On est d’ailleurs d’emblée immergé dans le registre de la BD-reportage, sans autre rythme narratif que celui de l’empilement de captures d’écrans ou de photos « décalquées » ou redessinées, commentées de manière aussi légère qu’ordinaire, et qui suivent le quotidien des ouvriers. Le travail de duplication au dessin a été confié à Virgile Dureuil, l’auteur qui adaptait jusqu’à présent les ouvrages de Sylvain Tesson (Dans les forêts de Sibérie, Berezina) en bandes dessinées. Dureuil réitère la griffe réaliste proprette et agréable dans cet ouvrage de commande et de tourisme industriel, sur un découpage accordant une grande place aux cases géantes (deux ou trois cases par page, maxi). Les lecteurs intéressés par le BTP hors norme découvriront un engin étonnant, le « dumper », qui s’adapte à la fois aux routes et aux rails… et c’est à peu près tout en ce qui concerne la dimension technique. Car la narration focalise aussi et surtout sur les moments avant et après le chantier, quand il s’agit de s’y mettre ou de s’en remettre. La pénibilité dans l’intimité des travailleurs de chantier, le petit café, le relationnel, sont bien plus le sujet que les travaux à effectuer, à proprement parler. C’est un peu dommage de mobiliser autant de talents (vidéos et graphiques) pour un « propos humain » aussi convenu, en tout cas qui ne nous apprend rien, a contrario des réels défis techniques de ponts et chaussées qui nous auraient permis une vraie démarche de vulgarisation. Du reste, le dessinateur et l’éditeur ont gravement relâché leur attention de relecture (et leur motivation ?) vers la fin, en laissant une jambe comme élément de décor d’un rocher (p.60), à partir d’une case majoritairement photocopiée depuis la page suivante.
