L'histoire :
Depuis son premier et unique roman il y a deux ans, publié à 3000 petits exemplaires, Fernando Villa est dans une impasse. Sa banquière et son éditeur le harcèlent de coups de fils et, en retour, il n’ose leur avouer qu’il a le syndrome de la page blanche : zéro inspiration. Chaque jour, il pense avoir déniché LA bonne idée de départ… qu’il trouve complètement naze le lendemain. Il confie régulièrement ses états d’âmes à Wanda, une jolie prostituée parquée devant son immeuble, sans jamais coucher avec elle, mais en la payant le tarif horaire correct. C’est son analyse psy à lui. Plutôt que de ruminer ses angoisses, il clope, picole et fait la fête avec des potes. Un soir, un ami de retour du chili lui fait fumer une substance nouvelle qui le plonge dans un sévère état. Il rentre chez lui sans trop savoir comment et ne se réveille qu’à 15h le lendemain, grâce au coup de fil inquiet d’un de ses amis. Il découvre alors son appartement maculé de feuilles d’écriture. Après avoir rassemblé et ordonné cette ahurissante production littéraire, il doit en convenir : c’est bien lui qui a écrit tout ça, même si ça ne ressemble en rien à son style habituel et c’est sans doute pourtant ce qu’il a écrit de mieux ! Les nuits suivantes, son inconscient se remet au travail et il découvre chaque matin le résultat, génial. Tantôt c’est sur un rouleau de PQ, tantôt carrément sur les murs de sa piaule, mais toujours sans aucun souvenir. En 3 nuits, son roman est bouclé, et c’est une bombe, promise au succès ! L’éditeur est aux anges, le bouquin est publié ! …Et un procès pour diffamation tombe aussitôt. En effet, le personnage psychopathe de sa fiction existe dans la réalité et il n’est pas content d’être ainsi calomnié ! Fernando n’y comprend plus rien. Et si son œuvre n’était pas une fiction…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Les fans de Stephen King peuvent se réjouir : ce Borderline là s’inscrit dans la même lignée (notamment Fenêtre secrète) que nombre des thèmes favoris du maître du suspens : un héros écrivain, une corrélation entre fiction et réalité, un biais fantastique encore inexpliqué… Les états d’âmes du héros, qui soliloque face à lui-même ou à Wanda, permettent l’identification et la captation immédiate du lecteur. On subit dès lors aux côtés de cet écrivain surpassé par sa création littéraire, l’aventure surréelle à laquelle il est confronté, sans en connaître pour le moment l’explication. Les prochains tomes, qui se liront à chaque fois en récits complets (c’est le concept), exploreront sans doute ce mystère… Après avoir livré en tant qu’auteur complet le one-shot Nathaniel (dans la même veine fantastique et chez le même éditeur) Alexis Robin confie cette fois le dessin de ce scénario piquant à Nathalie Berr. On avait déjà pu apprécier le talent de la dessinatrice sur les 5 tomes de la Maison-Dieu, mais on a ici l’impression qu’elle se surpasse encore. A l’aide de son crayonné élégant, personnages et décors, en plan large ou en macro plans (parfois osés !), sont peaufinés à l’extrême… et la colorisation de Christophe Lagrange s’adapte idéalement à ce style exquis. De la sacrée belle ouvrage ! A noter : le personnage de Fernando ressemble un peu beaucoup à Jean Reno (jeune)…