L'histoire :
Tombé amoureux fou d'une anglaise débarquée à Paris au cœur de mai 68, Florent quitte l'ambiance révolutionnaire pour la retrouver de l'autre coté de la Manche. Jenny est d'abord surprise de voir le froggy débarquer. Mais pleine de caractère, elle cède à ses avances en fixant ses conditions : une maison en Normandie, manger du camembert toute la vie et avoir une fille qui s'appellerait Lilie. Quelques années plus tard, Lilie à cinq ans et elle accompagne son père à l'enterrement de sa mère. La vie de Florent bascule du jour au lendemain. Il devient le point de repère unique d'une gamine qui ne réalise pas ce qui vient de lui arriver. Ils prennent le bateau qui vont les ramener d'Angleterre vers Cherbourg, où le jeune père se demande s'il aura la force nécessaire pour affronter tout ce qui, chez eux, va lui rappeler Jenny. Lilie, de son côté, a juste envie de s'acheter un coca au bar, sur le pont. Elle insiste même pour y aller seule et montrer à son père de quoi elle est capable. Florent prend juste le temps de fumer une cigarette, et lorsqu'il se retourne, Lilie a disparu. En tout cas, c'est ce dont il croit se souvenir...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
L'association de Damien Marie et de Laurent Bonneau promettait à la fois une certaine forme de densité, de noirceur propre au scénariste sans concession de Dans mes veines, et un pas graphique du coté d'une narration visuelle moderne et hors des conventions. Laurent Bonneau accompagne en effet ce long récit de près de 150 pages en prenant le temps de créer des séquences continues, avec peu d'ellipses, dans le style des romans graphiques que la BD moderne, américaine ou européenne, produit aujourd'hui. Il faut plus de 50 pages pour que le lecteur soit cueilli par la révélation de ce qui sera le cœur de cette histoire irréelle et touchante. On le découvre avec d'autant plus de plaisir qu'on aura évité de lire le pitch de l'éditeur, trop précis dans le secret qu'il dévoile. La maîtrise des auteurs est frappante dans sa capacité à bousculer les certitudes du lecteur, Bonneau émaillant par ailleurs ses planches de repères de couleur très frappants, comme le très obsessionnel ciré jaune de Lilie, qui suit la belle utilisation du bonnet rouge de la gamine dans les allées du cimetière. Ce récit intimiste parcourant la vie d'un homme est porté par le style original d'un dessinateur qui utilise les aplats de couleurs informatiques pour créer des tableaux contemporains pleins de tension. L'album est accrocheur, sans jamais donner dans la facilité, confrontant les personnages à une réalité que beaucoup rencontrent un jour dans leur vie.
