L'histoire :
Un avion est en approche de l’aéroport de Vologda, une ville située à 400km au nord de Moscou. Un petit groupe d’hommes et de femmes ayant subi un traumatisme et vivant en marge de la société ont accepté de participer à un projet du gouvernement au centre de recherche neurologique Matriochka. Dans le groupe des « abîmés », Natacha est une jeune institutrice traumatisée par l’assassinat de son mari et de ses deux enfants. Une fois installée dans le complexe, la jeune femme ressent une sorte de malaise. Une sensation déclenchée par des détails qui lui reviennent à l’esprit depuis qu’elle a posé le pied sur le tarmac de l’aéroport. Il y a ce regard singulier que lui a jeté l’hôtesse d’accueil. Un regard noir rempli de reproches, alors qu’elle est sûre de ne pas connaître cette femme. Puis l’impression persistante au plus profond d’elle de connaître le professeur Vetrov, le responsable du programme de traitement. Puis, il y a l’intervention musclée des gardiens lors de l’altercation entre deux patients du centre. D’ailleurs, ces derniers sont armés. Etonnant, pour un centre de recherche ! Quelque chose n'est pas normal et Natacha a bien l’intention d'en découvrir la raison.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le scénario de Philippe Pelaez se focalise de prime abord sur les lésions neurologiques induites par des chocs traumatiques. Le lecteur suit avec attention l’évolution du petit groupe d’« abimés » depuis leur descente de l’avion jusqu’aux premières évaluations. Puis vient le doute concernant la vraie raison de la présence de ces volontaires cobayes dans le centre, avec les différentes situations, les apartés ou encore les indices laissés dans le texte des personnages. D’ailleurs, une sorte de doute « naturel » est déjà installé par l’a priori, puisque le récit se déroule en Russie où le subconscient du lecteur occidental s’imagine très facilement, à tort ou à raison, des pratiques peu éthiques sur les humains. C’est ici la force du récit : emmener le lecteur dans une machination au sein de laquelle il ne sait plus trop qui tient les rênes de l’intrigue et qui se joue de qui. Le récit d’action dynamique comporte une jolie part de psychologie, avec des personnages principaux et secondaires qui apportent chacun une brique au scénario. Certains retournements de situation laisseront le lecteur coi. Au niveau du récit, l’album est découpé en chapitres se référant à des monuments du 7ème art comme Fenêtre sur cour ou encore Vol au-dessus d’un nid de coucous. Les références cinématographiques ont un lien avec le récit, ce qui apporte un petit clin d’œil pour les initiés. Pour les autres, pas d’inquiétude, le récit vit très bien sans ces références. L’ambiance graphique est réalisée par Olivier Mangin avec un trait réaliste. Les personnages sont détaillés et les décors travaillés. Le découpage est moderne et dynamique, ce qui colle très bien avec le genre du récit. Ainsi, ce premier tome se présente comme un récit dynamique et psychologique justement mené et s’appuie sur une ambiance graphique de qualité. Un très bon divertissement.