L'histoire :
A peine a-t-il réussi à convaincre son riche beau-père du bien-fondé d’un vaste projet immobilier, que Javier se dispute violemment avec sa femme. Enceinte, Alejandra fait une chute mortelle dans l’escalier en marbre de la villa. Javier maquille aussitôt ce meurtre en accident et trouve un sordide arrangement à l’hôpital, pour faire croire que le bébé a survécu : il rachète à un médecin qui vient d’être papa, l’un de ses bébés jumeaux. 15 ans passent. Elevé par son père avec une cuillère en argent dans la bouche, Fernando évolue dans un style de vie huppé et bénéficie d’une éducation bourgeoise. César, quant à lui, s’est éduqué tout seul, dans les favelas de Bogota : sa mère est gravement malade, son père est une épave rongée par la drogue. Mu par un sang froid exceptionnel, il est devenu un sicaire (un enfant tueur) efficace et respecté. César ne tire jamais qu’une seule balle, toujours dans la tête. Car il a des principes, dont celui de reverser généreusement une partie de ses gains à un ami curé ou de ne dealer que de la marijuana, jamais de cocaïne. En raison d’un autre principe, celui de ne jamais flinguer sa victime devant son enfant, l’un de ses contrats échoue. Dès lors, de tueur, il devient une cible. C’est alors qu’il croise en boîte de nuit un incroyable sosie, Fernando. Il décide alors d’inverser les rôles…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Généralement, l’utilisation de la gémellité dans les thrillers donne lieu à de grands moments de série Z… Ici, fait exceptionnel, l’intrigue mise au point par Laurent Galandon est cohérente et vraisemblable. Mieux, elle est même carrément captivante ! Au dessin, l’italien Michele Benevento livre un travail réaliste impeccable, aussi réussi sur les plans larges que pour les personnages et leurs mouvements. Le cadre de la banlieue pauvre de Bogota rappelle le décor impitoyable de la série Cuervos. La révélation des origines familiales suite à un échange au berceau fait aussi penser au film La vie est un long fleuve tranquille. Les conséquences de cette substitution tendent ici toutefois vers le thriller musclé plutôt que vers la satire sociale grinçante... sans se priver de faire une intéressante étude de société. En parallèle à l’intrigue machiavélique, Galandon développe le thème de l’enfance tourmentée, récurrent à sa récente Envolée sauvage. Grandir dans les favelas est en effet une véritable malédiction : l’espérance de vie d’un enfant sicaire y est de 14 ans… Evitant tout manichéisme, Galandon assemble habilement tous ces éléments, en dosant parfaitement action et suspens. Le devenir des jeunes héros tient le lecteur en haleine, pour la suite (et la fin) de l'aventure, promise pour 2007...