L'histoire :
Arrêtées avec leurs parents en juillet 1942, Ada et Lucja, deux petites filles de confession juive, parviennent grâce à la malice de leur tante à s’échapper du Vel’ d’Hiv’ où elles étaient parquées avec des milliers d’autres. Bientôt, sous une fausse identité, elles sont recueillies dans la ferme de la vieille Berthe, en pleine campagne. Elles s’habituent rapidement à leur nouvelle vie, rythmée par les chamailleries avec leurs nouveaux camarades. Mais la quiétude est de courte durée : le fils de Berthe, un collaborateur notoire, décide de les livrer aux occupants. Il s’en faut de peu... mais grâce à l’aide de leurs amis et d’un réseau de résistance, elles réussissent une nouvelle fois à échapper à la barbarie nazie. C’est en train, cachées dans une bétaillère par un cheminot complice, qu’elles arrivent en zone libre. Leur destination : la grande bâtisse de M et Mme Zilbermann, un couple juif âgé qui recueille depuis quelques temps des enfants dont le destin est aussi trouble que celui d’Ada et Lucja. Bientôt, elles font la connaissance d’Isaac, un passionné de photographie, mais aussi de Gabor, un tzigane chargé de la cuisine et de l’entretien de l’écurie. Ada fait partie des plus grandes. Aussi, le soir, c’est elle qui se charge de raconter une histoire pour endormir les plus petits. Un rôle qui lui fait s’attirer les faveurs du petit Théodore, un blondinet arrivé par le même train qu’elle et qui reste désespérément muet...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La fuite. Une nouvelle fois… Déjà contraintes par les événements de quitter dramatiquement la ferme de Berthe, Ada et la petite Lucja ne se laisseront pas bercer longtemps par le confort de la zone libre : une vieille connaissance et un hasard malheureux bousculeront à nouveau leur destin. Tragiquement… Au bout du compte, l’Histoire est habilement distillée : à portée d’enfant et d’enfance pour une « matérialisation empathique » de la déportation, de l’univers concentrationnaire et de la vie brisée d’enfants qui avaient juste eu la mauvaise idée d’être nés. Plus encore, peut-être, dans cette conclusion du cycle 2, le courage d’Ada touche. La petite endosse encore principalement – tout comme « son » Simon dans le cycle 1 – le rôle du témoin. Celui d’une réalité historique qu’il sera nécessaire de faire partager indéfiniment. Pas des plus originaux sur sa trame de fond – car souvent décliné sous cet angle via de nombreux supports – le récit emporte pourtant l’adhésion. D’abord parce qu’il combine au millimètre charge émotionnelle, action, rebondissements, drame et empathie. Mais aussi – et peut-être surtout – parce qu’il assure parfaitement son rôle de transmission en s’adressant si justement au lecteur (en particulier au jeune public) qu’Histoire tragique, récit d’enfance, compassion, propensions romanesques s’entrelacent à la perfection. L’exercice ne cherche jamais à titiller la corde du traumatisme. Pour autant, il reste explicite et décrit avec force ce qu’ont vécu des milliers d’enfants juifs durant la seconde guerre mondiale. De la même manière, le trait tout en rondeur d’Hamo, parfaitement cadré, sert impeccablement les intentions du récit : toucher sans édulcorer la réalité historique et transmettre intelligemment l’Histoire sans traumatiser.