L'histoire :
Le malheur veut que Hubert 31-36, bébé tout mignon, sourie et rie dès sa naissance. Ses parents sont horrifiés, car il est formellement interdit de rire par le roi, monsieur Joyeux. Ils n’arrivent pas à l’empêcher, alors ils le jettent par la fenêtre. Mais l’enfant tombe dans les ordures, il est sauvé. Pas pour longtemps, car la terrible police du rire l’arrête, ainsi que ses parents. Ils sont tous soumis à un châtiment atroce : on leur scie la bouche vers le bas, dans un rictus sinistre. Car sinistres ils sont et sinistres ils doivent rester. Les rires et sourires appartiennent à la famille royale. Pour les sept d’Hubert, la naissance de la jolie princesse Carminé est fêtée par la permission exceptionnelle de rire pendant 22 secondes pour les sinistres. Sept ans plus tard, Monsieur Joyeux, le roi et père de la princesse Carmine, et Fol Espoir, son oncle, frère du roi, s’affrontent pour le trône. Alors que Monsieur Joyeux est un dépressif chronique qui se force à rire, Fol Espoir est un joyeux drille qui est aimé de tous, et surtout de sa fille. Le roi le chasse et il va, dans les bas-fonds du pays des sinistres, en bas du bas, lancer une grande machination contre son frère, à la grande tristesse de la petite Carmine.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le monde se divise en deux catégories : ceux qui ont le droit de rire, et ceux qui bossent. Le paradigme du monde de L’homme sans sourire est terrible : seuls ont droit de rire les nantis, le roi et sa cour. Les gens de misère sont condamnés à la tristesse, à la sinistrose. L’allégorie de la vie réelle est flagrante et d’autant plus insupportable. Louis nous offre un album de désespéré, fou et à certains moments hilarant, d’un humour noir comme une nuit sans lune. C’est toujours très intelligent, souvent dérangeant. Ça pourrait donc être un chef d’œuvre… mais Louis pousse la folie jusqu’à utiliser une narration très directe, avec des adresses répétées au lecteur, des mises en abyme, etc. qui finissent par lasser. Le scénario est complexe et le monde bien travaillé, mais tout cela aurait mérité peut-être un développement plus lent pour apprivoiser un peu le lecteur. La mise en images de Stéphane Hirlemann est agréable et les couleurs de Véra Daviet donnent une belle cohérence à l’ensemble. Au final, l’album se lit assez vite. C’est un bazar à l’humour féroce, terriblement désenchanté. Un ovni qui pourra être adoré ou détesté.