L'histoire :
Ce matin-là, les policiers repêchent dans la Seine le cadavre d'un homme avec, dans la poche, un message écrit, une lettre d'amour désespérée qui laisse penser à un suicide. L'inspecteur Dormoy n'en est pas à son premier cas, mais quelque chose de particulier suscite sa curiosité. Le suicidé s'appelait d'ailleurs Jules comme lui. Les environs de la tour Eiffel sont victimes en ce moment d'une série de vols qui touchent les passants sans distinction, et surprennent par l'habileté du voleur. Une relation de Jules lui rend visite au commissariat pour porter plainte. Il s'est fait dérober sa sacoche, avec des documents très importants qu'il destinait à un député, et qui contiendraient des secrets d'état très sensibles. Dormoy lance une opération d'envergure pour attraper le pickpocket, mais même lors de sa première intervention, c'est quasiment sous ses yeux que les gens réalisent qu'ils viennent de se faire subtiliser leur portefeuille ou un bijou. A quelques rues de là, une jeune femme fait l'inventaire de son butin du jour : un sac en cuir avec des fiches concernant des militaires, sans intérêt de toute évidence, de beaux bijoux et des montres à gousset, de l'argent bien sûr. Et un portefeuille qui contient une très belle lettre d'amour tellement triste, et le nom de son auteur : Jules Dormoy. Touchée par ce très beau témoignage, et se disant qu'elle peut éviter l'irréparable, elle décide de se rendre à l'adresse de Jules.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après le Canonnier de la Tour Eiffel, voici une nouvelle histoire autour du célèbre monument, dans le Paris du début du siècle dernier. Jack Manini au scénario, cette fois accompagné d'Hervé Richez, retrouvent David Ratte pour illustrer cette enquête légère autour de vols systématiques sur le parvis de la grande dame. On débute par un clin d'œil qui remet en scène le canonnier qui sonne midi et les trois hommes en noir qui lui donnent le top. Le ton est résolument drôle et grand public, le dessinateur s'amuse dès la première page avec les visages de ses protagonistes aux expressions un peu exagérées, un peu comme s'ils jouaient dans un film muet. Les décors et les costumes sont très beaux, détaillés à souhait. Ratte est un artiste très productif, il est déjà au générique de trois albums cette année, à chaque fois d'une qualité constante dans un style semi-réaliste techniquement exigeant. Les deux personnages principaux sont sympathiques et attachants, et les scénaristes ont ajouté au piquant de leur rencontre le contexte d'un scandale politique des années post-Dreyfus, lorsque des fiches avaient été créées en secret sur des militaires. Cela donne une petite densité supplémentaire à cette aventure gentiment rétro, qui nous fait passer un bon moment sans autre prétention que la distraction, mais très bien construit par des auteurs qui connaissent leur métier.