L'histoire :
Emile est maître d'hôtel. Tous les matins, il commence sa journée par une routine bien ficelée. Le tic du réveil le tire du sommeil à une heure précise. Puis il fait sa toilette. Il s'habille, se coiffe. Tous ses gestes sont réglés comme du papier à musique. Cette monotonie le rassure. Il fait son métier et il le fait bien. Il prépare ensuite le petit-déjeuner et vérifie le registre pour retenir les chambres et les noms des clients. Après ce cérémonial, c'est l'heure pour Emile d'entrer en scène. Il attend les clients à la sortie du train et les accueille comme il se doit. Puis il leur explique la raison de leur présence. En effet, chaque client de l'hôtel est mort. Une chambre leur a été attribuée. Dans celle-ci, des souvenirs sont disposés. Ils ont un temps imparti pour faire le point sur leur vie et affronter leurs regrets. Ceux qui réussissent partent dans un autre monde. Ceux qui échouent sont aspirés par les ténèbres. Et ils sont condamnés à hanter la forêt proche. Emile recommande d'ailleurs aux clients de ne pas prêter attention aux hurlements des âmes errantes, et de ne pas se rendre dans la forêt. A chaque nouvelles arrivées, Emile réussit à accompagner ses clients, mais parfois il échoue. Un matin, il oublie de se réveiller. C'est la panique ! Et trois personnes sont arrivées ! Pourtant, il n'y a pas eu de train... Ils n'ont pas de souvenirs dans leur chambre non plus... Qui sont-ils ? Que font-ils là ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Nicolas Delestret est l'auteur, notamment, de La maison aux souvenirs. Il explore de nouveau la thématique de la mémoire, du poids des souvenirs, sous une forme différente. Ce one-shot commence par une situation qui semble ordinaire : un maître d'hôtel appliqué s'apprête à recevoir de nouveaux clients. Mais très vite, nous comprenons que nous évoluons dans un univers fantastique. Les clients sont morts et l'hôtel est une sorte de purgatoire, un endroit où ils devront réussir à se réconcilier avec eux-mêmes pour continuer leur voyage sans être aspirés par les ténèbres. L'entrée en matière est réussie. Au bout de quelques pages, le lecteur bascule dans une autre atmosphère, plus pesante, plus angoissante. La légèreté et la bonne humeur d'Emile font place à une situation étrange, où tous les personnages ont perdu leurs repères. L'album est prenant, et il titille notre curiosité, nous pousse à tourner les pages pour découvrir le fin mot de l'histoire. Même si la fin reste assez convenue, l'auteur a créé un monde atypique, avec de nombreuses références, notamment cinématographiques. Le trait est rond et apporte de la douceur, même si certaines scènes dans les bois jouent sur un suspens croissant. Cette bande dessinée réussie questionne sur plusieurs sujets lourds, comme le deuil, le rapport aux souvenirs, la volonté de s'occuper des autres pour fuir sa propre situation.