L'histoire :
La première journée des grandes vacances ne fut pas celle que Marcel avait vécue par avance avec tant de joie : Lili ne vint pas l’appeler à l’aube comme il l’avait promis. Il lui avait laissé un mot pour l’informer qu’il devait aider son père à la moisson. Il lui donnait rendez-vous au champ des Becfigues. Le puissant soleil de juillet faisait grésiller les cigales et, sur le bord du chemin, des toiles d’araignées brillaient entre les genêts. Marcel posait ses sandales dans les pas de l’année dernière et le paysage le reconnaissait ! La vieille bergerie avait perdu la moitié de son toit, mais contre le mur en ruine, le figuier n’avait pas changé. Et il baisa sa peau d’éléphant en lui murmurant des mots d’amitié. A sa gauche, la haute barre feuilletée du plan de l’aigle soutenait l’immense plateau qui montait par une petite pente douce, jusqu’à la nuque de Garlaban. Il sentit sous sa paume, à travers le fin tapis de ramilles de pin, quelque chose de dur qui n’était pas une pierre : un vieux piège qu’il mis dans sa musette, avant de rejoindre au galop Lili…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le temps des secrets est le 3ème des 4 romans autobiographiques de Marcel Pagnol, fils d’enseignant et lui-même enseignant. Cet opus est d’ailleurs essentiellement consacré à sa scolarité et son entrée en 6ème. Alors qu’il était un élève modèle dans son école de campagne, le lycée va être un bouleversement pour Marcel. Au-delà du fait qu’il va être au contact d’un corps professoral aux personnalités très variées, c’est avant tout la découverte de l’esprit de camaraderie entre adolescents qui va marquer cette période et offrir de multiples anecdotes (et souvenirs). Evidemment, comme toute œuvre de Pagnol, le charme de la Provence et son identité y sont largement représentés, avec notamment ses parties de boules homériques et ses parties de chasse mémorables… Pour cette adaptation BD, Serge Scotto et Eric Stoffel ont pris le parti de ne pas parler d’Isabelle, la petite fiancée de Marcel. Comme l’aurait souhaité Pagnol lui-même, s’il avait pu remanier son texte pour l’équilibrer et lui donner plus de logique, cette relation affective aurait été évoquée dans Le temps des amours. Même si cet album est bavard, on savoure les textes et dialogues qui ont fait la renommée de ce dramaturge incontournable. Le dessin semi-réaliste au trait affirmé de Morgann Tanco sert parfaitement l’ambiance de cette époque révolue. La densité de son graphisme et son aisance dans des univers aussi variés que les salles de classe, les cours de récréation agitées ou les grands espaces de la garrigue provençale, démontrent toute l’étendue de son talent. A noter que la qualité de la mise en couleur de Sandrine Cordurié vient peaufiner ce joli travail.