L'histoire :
Manon et sa mère vivent à la grotte du plantier dans l’étrange palais de Baptistine, la vieille piémontaise. Aimée n’a touché à rien mais elle a aménagé la bergerie qui occupe la moitié de la Baume. Dès 6h00 du matin, elle prépare le déjeuner comme autrefois, mais l’après-midi, elle reste parfois des heures assise à parler à mi-voix. Certes, elle n’est pas folle, mais la mort de son mari Jean Cadoret (Jean de Florette), a troublé sa raison. Manon s’applique de tout son cœur à son petit élevage de lapins dont la réussite constante justifie les espoirs déçus de son père. Tous les mois, elle confie à la grosse revendeuse de monsieur Jean quatre ou cinq lapins de belle apparence. Au domaine des romarins, Ugolin a installé une florissante exploitation d’œillets. La source qu’il a volontairement camouflée au pauvre bossu coule à niveau et lui permet ainsi de faire sa fortune.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après l’adaptation BD très remarquée de Jean de Florette, c’est logiquement la suite du diptyque de Marcel Pagnol, L’eau des collines, qui est publiée dans la collection Grand Angle des éditions Bamboo. Si Manon occupe une place importante dans cette histoire, le personnage principal demeure Ugolin. Ce paysan à l’âme crasseuse, cet hypocrite cupide peut susciter des sentiments ambivalents chez le lecteur. En effet, malgré le mal qu’il a pu faire à Jean et à sa famille, on peut éprouver une certaine pitié pour ce triste sire qui souffre de la solitude et qui n’a aucune chance de séduire celle dont il est secrètement tombé amoureux. Même si l’œuvre de Marcel Pagnol se prête bien à une adaptation BD, il n’en demeure pas moins difficile de rester fidèle à ce classique de la littérature française. L’adaptation que proposent Serge Scotto et Eric Stoffel restitue avec finesse et beaucoup de justesse la psychologie des personnages. Si nous sommes les témoins de la naissance de sentiments amoureux chez Manon pour le nouvel instituteur du village, on sent également la colère de Manon se cristalliser en haine viscérale contre Ugolin. Cette dernière va vouloir venger la mort de son père. Le papet, ce patriarche froid et calculateur est également bien campé dans cette version BD, ce qui donne au récit toute son intensité. Au dessin, Alexandre Tefenki qui a réalisé Jean de Florette a cédé la place à Christelle Galland. Les décors sont plus sobres, davantage dépouillés. Quant aux personnages, ils ont légèrement évolué mais demeurent parfaitement identifiables. Encore un album de grande qualité dans cette collection qui rend un bel hommage à l’académicien provençal certainement le plus célèbre et le plus populaire.