L'histoire :
Nous sommes à quelques jours des vendanges, dans un domaine bourguignon près de Tournus. Xavier, Christophe et Samuel sont trois frères qui font fonctionner le domaine. Chacun a un rôle attitré, sous le haut patronage de leur mère qui les aide à perpétuer la tradition familiale. Un matin, Jojo le caviste débarque à l'improviste et emmène Samuel à la recherche du domaine qui produit le Royal Essentia, un vin qu'il vient de déguster et qui l'a laissé subjugué. Un coup de tête déraisonnable typique des deux amis, qui se retrouvent en Hongrie en quelques heures de trajet en voiture. Il y découvrent les méthodes très particulières de fabrication de l'aszu, la pâte constituée de raisins très mûrs foulés au pied, et dont le jus est gardé dix ans avant d'être utilisé pour fabriquer un vin unique au monde. A son retour au domaine, Samuel découvre avec ses deux frères une maladie qui s'est abattue sur leurs vignes, dont les pieds sont marqués par de grands cercles jaunis. Les analyses du labo donnent leur verdict irréfutable : il s'agit de flavescence dorée. Et l'arrêté préfectoral tombe rapidement : il faut arracher tous les pieds qui sont touchés, ce qui représente près d'un tiers du domaine. Se pose alors la question de l'avenir de l'entreprise, et des tensions apparaissent au sein d'une famille auparavant très unie...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cette nouvelle histoire qui réunit des vignerons et des passionnés autour de la fabrication du vin donne le ton de la série, qui s'affirme comme un mélange de traitement grand-public et d'érudition pointue. L'intrigue qui débute autour d'un trésor originaire de Hongrie en est un bon exemple ; elle ne parlera qu'à ceux qui ont un jour découvert les Tokaji, vins sucrés très réputés dans le pays, mais pas vraiment communs chez nos cavistes. Les auteurs font le maximum pour donner à leurs personnages des accents de vérité, et ils adorent visiblement mettre en scène les émotions ressenties autour de la dégustation amicale d'une nouvelle bouteille. L'amitié et le respect entre professionnels sont au cœur de cet univers presque hors du monde, une plongée dans l'envers du décor pour le lecteur. En imaginant la difficulté financière que rencontre le domaine des trois frères, Hervé Richez et Emmanuel Guillot ajoutent un suspense à la série de conversations et de discussions enflammées qui constituent la chair de cet album. Appuyées sur le dessin souple et très accompli de Boris Guilloteau, les péripéties se lisent sans difficulté, malgré la répétition des scènes de dégustation. Alors que le premier tome nous promenait sur des terres bourguignonnes, ce nouvel épisode nous rend curieux des vins de Hongrie, comme de ceux du Jura. Toujours sur un fond de passion artisanale. Et toujours avec force explications érudites qui nous confirment que fabriquer du vin n'est pas à la portée du premier venu.