L'histoire :
La petite Germaine a dix ans en 1912 lorsque, dans les chemins surplombant Castelnau-le-Lez, où elle habite avec ses parents, elle prend conscience de la force, de l'étrangeté et de la vitalité de la nature. Elle, dont les parents ne sont pas du tout liés à l'art, va se mettre à collectionner les écorces, les bois tordus, et se fasciner pour quelques insectes, tels les mantes. Les arts du bas-relief et de la sculpture l'interpellent tout particulièrement. Et alors qu'elle est élève douée aux Beaux arts de Montpellier, de 1921 à 1925, sur recommandation de son professeur Louis-Jacques Guigues, elle va se présenter au célèbre sculpteur Bourdelle, et devenir sa dernière élève. Elle-même s'affirmera comme la première grande sculptrice de son temps. Sa carrière sera flamboyante, mais elle sera cela dit interrompue trop tôt, même si elle a pu éviter la guerre, réfugiée avec son premier mari en Suisse avant de revenir sur Paris.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Laurence Durieu est journaliste et petite nièce de Germaine Richier. C'est une rencontre en 2007 avec Claude Mary, l’élève de cette dernière, puis son assistante durant plus de dix ans, qui a initié ce travail biographique. Celui-ci permet d'enfin pouvoir offrir une visibilité et une reconnaissance méritées à une artiste ayant marqué tout le début du XXème siècle, avec des œuvres libres, différentes, choquantes à l'époque, dont on comprend aujourd'hui l'étonnante modernité. Disposant de nombreuses archives familiales, des correspondances et des témoignages d'autres artistes, et ayant baigné dans ce terreau, elle s'est adjointe les services d'Olivia Sautreuil, une dessinatrice surtout connue pour ses travaux dans l'édition jeunesse. Celle-ci, pratiquant aussi la sérigraphie dans son atelier bruxellois, a su avec brio capturer et reporter la valeur, la vitalité et l'énergie du personnage et de ses œuvres, grâce à un trait ample et souple, de grands aplats de noir et une technique de ligne claire parfaitement maîtrisée, offrant de superbes planches tout au long de l'album. On sent bien le travail de la sérigraphiste qui, comme le graveur, laisse les blancs et le noirs s'intercaler entre eux, telle une danse de volutes. Au-delà de la découverte d’une dessinatrice très douée, que l’on recommandera aux amateurs de Floc’h, par exemple, il n'en fallait pas davantage, de la gravure à la sculpture, pour rendre le plus bel hommage qui soit à cette artiste majeure mais quelque peu oubliée qu'est Germaine Richier, et lui redonner toute la visibilité qu'elle mérite. Du bel ouvrage, qui pourrait quasiment s'apprécier juste pour ce qu'il est : un très beau roman graphique.