L'histoire :
Une archéologue que Mortimer a bien connue des années plus tôt est en mission dans l'Oural, au cœur de l'Union Soviétique, pour tenter d'y dénicher les preuves de l'existence de l'antique cité d'Arkaïm. La découverte d'une civilisation slave antérieure à la latine serait un triomphe pour le régime, Olga a le soutien des autorités. Mais ce que les ouvriers déterrent n'est en rien ce qu'elle espère : dans des caisses en bois, elle découvre les cadavres de six hommes fraichement assassinés, leurs visages tous atrocement mutilés de la même manière. Elle décide de faire appel à son vieil ami Philip, qui va obtenir son visa en tant que scientifique, sans savoir le moins du monde ce qui l'attend sur place. Lors d'un dernier diner avec Francis Blake avant son départ, il s'avère que ce dernier est lui aussi sur le point de s'envoler vers une nouvelle mission, sur laquelle il doit malheureusement garder le secret. Les deux amis se quittent sans savoir dans quel nouveau péril ils se lancent tous les deux. Au moment où Mortimer foule les terres soviétiques, Blake vient de rejoindre des collègues de plusieurs pays au bord du lac Léman. Un espion infiltré a été tué alors qu'il franchissait le mur de Berlin vers l'Ouest pour y révéler un grand secret, mais il n'a eu le temps de livrer qu'un mot : Doppelgänger !
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce nouvel album de Blake et Mortimer débute de très belle manière, par une découverte macabre aux confins de l'URSS et une scène d'évasion pleine de tension au-dessus du mur de Berlin. Les scénaristes José-Louis Bocquet et Jean-Luc Fromental ont choisi de miser sur l'intrigue et les rebondissements, en construisant un scénario sur une bonne idée que l'on comprendra assez tard dans le récit. Ils réussissent, en particulier dans la première moitié de cette aventure, à créer des moments denses où le suspense fonctionne vraiment, et quelques scènes marquantes comme ce cobaye humain qui déclame des vers d'un grand dramaturge anglais. Une toute petite dose de second degré par endroits rend presque les personnages plus humains. Les auteurs se sont appropriés avec ce qu'il faut d'originalité les deux héros de Jacobs, Mortimer en particulier. Graphiquement la partition est réussie, Antoine Aubin n'est pas le plus fidèle au style d'E.P.Jacobs, le visage et la silhouette de Blake en particulier ont une touche assez personnelle, mais les décors en particulier contribuent au plaisir de lecture rétro qui motive bon nombre de fans. Aubin soigne beaucoup ses ambiances avec des détails d'intérieurs ou des éclairages qui nous plongent complètement dans l'époque. Il en fait par moments presque plus que le maître dans la variété de style des fauteuils ou les personnages s'assoient, ou la précision du mobilier de bureau, mais ça ne semble jamais exagéré ou artificiel. Sur les quelque soixante pages de ce one-shot, les puristes des détails noteront quand même quelques micro invraisemblances, ces moments où l'intrigue décoince un peu vite, mais franchement rien qui ne gâche le plaisir des retrouvailles. Bravo aux trois auteurs qui ont réussi un des meilleurs épisodes de ces dernières années.