L'histoire :
Dès sa plus tendre enfance, Hermann Karnau ressent une extrême sensibilité aux bruits et aux sons. C’est ce qui l’amène, une fois adulte, sous le régime nazi, à devenir un acousticien réputé. C’est notamment lui qui est choisi pour sonoriser précisément les stades où le Führer doit tenir ses discours. Il faut que le son et la voix métallique d’Hitler pénètrent littéralement chaque membre du public, sans parasite, sans écho… C’est encore lui qui se retrouve un beau jour au domicile de Goebbels, ministre du Reich responsable de la propagande. Les conférences de Karnau et l’apport de ses écoutes fines sur le front de la guerre ont convaincu les hauts-gradés de lui confier des missions de recherche de première importance. Karnau doit alors pratiquer des opérations chirurgicales sur les cordes vocales d’individus afin de mieux comprendre les particularismes de la langue allemande. L’acousticien se met aussi à enregistrer et consigner sur disques de cire les ambiances de la famille intime de Goebbels. Ce faisant, il sympathise avec les cinq filles et le fils du ministre, des enfants qui jouent la plupart du temps, sans la moindre idée de la nature infâme de leurs parents, ni de leur courte destinée…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Connue pour son Prix Révélation à Angoulême (2011) pour Trop n’est pas assez, Ulli Lust adapte aujourd’hui un roman quelque peu dérangeant de Marcel Beyer. A force de détours, de flashbacks et de parenthèses, le lecteur est globalement présenté à un acousticien de fiction, Hermann Karnau, qui mènera les débats. Puis petit à petit, on s’aperçoit que l’acoustique est en réalité un prétexte pour approcher le véritable cœur du sujet : l’assassinat au cyanure des 6 enfants de Goebbels, avec leurs parents, dans le Führerbunker de Berlin, aux derniers jours du Reich. Ouééé, c’est la fête de la joie… Mais si l’ouvrage épais (364 pages) est particulièrement ardu à avaler, c’est pour d’autres raisons. D’une part, le sujet dérange. L’innocence récurrente des jeux d’enfants vient en opposition avec la dureté d'ambiance et certaines séquences (les expériences chirurgicales sur les cordes vocales, par exemple). On côtoie en permanence le staff du troisième Reich, à son pire moment historique... et c’est la futilité infantile qui en ressort ! On se demande aussi à quoi sert le parti-pris narratif du traitement dans la longueur, composé de digressions interminables, redondantes et peu explicites dans leurs intentions. Seuls les quelques détails techniques de l’acoustique tirent leur épingle du jeu. On constate notamment, circonspect, que la gravure au sillon sera boudée au lendemain de la guerre, avant l’invention de la bande magnétique bien des années plus tard. Au final, on cherche toujours le propos réel de ce récit de semi-fiction grave et pénible, qui n’apporte pas grand-chose à la Mémoire.