L'histoire :
En 1913, alors âgé de 63 ans, Pierre Loti reçoit la visite de son amie, la princesse Alice de Monaco, épouse du prince Albert Ier, qui lui voue une immense admiration. Ils boivent le thé au milieu des souvenirs des quatre coins du monde, et la princesse demande à l’écrivain-explorateur de lui raconter ses voyages, en commençant par le premier... l’île de Pâques. A l’époque (janvier 1872), Pierre Loti s’appelait encore Julien Viaud et il était officier de marine engagé à bord d’un voilier. Avec son équipage, il avait découvert une île esseulée et aride, perdue au milieu de l’océan, juste habitée par 300 ou 400 indigènes. Ils avaient visité les sites où se trouvent les moaïs, ces statues de têtes géantes, et en avaient même scié une en tranche pour la charger à bord de leur voilier et la rapporter sur le continent. Puis ils avaient mis le cap sur Tahiti. Loti avait alors cherché à rencontrer Tarahu, la veuve de son ami médecin Gustave. Mais la rencontre avait été décevante. Loti avait alors beaucoup dessiné et il avait rencontré de très belles femmes épatées par son coup de crayon. Ce sont les indigènes de cette île qui le baptisèrent « Loti », car cela voulait dire « rose », le nom d’une fleur. Mais il avait fallu repartir et cela avait été un crève-cœur. Cap sur l’Afrique noire…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans le genre « vie bien remplie », l’écrivain Pierre Loti, de son nom de baptême Louis-Marie-Julien Viaud, s’impose là. Cet officier de marine française a fait mille voyages, de l’île de Pâques au Japon, en passant par la Turquie et même la Bretagne (le diiiingue !) La plupart de ses œuvres littéraires (Le mariage de Loti, Le voyage d’un spahi, Madame Chrysanthème, Aziyadé…) sont ni plus ni moins le récit autobiographique de ses voyages et de ses rencontres… enrichissantes, pour ne pas dire intimes. C’est aujourd’hui l’éditeur historique de Loti, Calmann-Levy, qui propose cette sorte de biographie en bande dessinée, scénarisée par Didier Quella Guyot et Alain Quella-Villéger. On sent bien l’admiration des deux frères (jumeaux ! malgré leurs patronymes différents) pour l’œuvre de ce bourlingueur-séducteur. Sous prétexte du récit oral à une amie (Alice de Monaco), Loti empile ses expériences en un catalogue de séquences en flashbacks. Tous sont introduits et ponctués de réguliers et nombreux narratifs, morceaux choisis issus des textes du romancier. Plus étonnant, est l’engagement graphique sur ce one-shot de Pascal Régnauld, qu’on avait jusqu’à présent plutôt l’habitude de croiser dans le milieu des thrillers (Canardo, Balle tragique pour une série Z). Le dessinateur utilise la même griffe que celle de Trou de mémoire : des personnages stylisés, aux proportions fluctuantes, au milieu de décors soignés, le tout emballé par une élégante bichromie jaune-noire (ou bleu-noire, pour les quelques rappels du rendez-vous présent avec Alice). La couverture ne ment pas et invite au voyage. Embarquez donc !