L'histoire :
En août 1944, les troupes américaines libèrent Nice de l’occupant allemand. Tandis que les chars et les jeeps manœuvrent en ville, des prisonniers sont constitués et les français se mélangent aux GI pour acclamer dans la rue leurs libérateurs. Parmi les fêtards, se trouve Virgil Burdette, un noir américain, fils d’un célèbre guitariste qu’il n’a jamais connu. Virgil sait néanmoins fort bien jouer de la guitare et il s’empresse d’accompagner deux camarades – trompette et harmonica – pour participer à la joie collective en terrasse d’un bistro. Il s’embrouille alors avec un compatriote blanc au sujet d’une française. Jaloux, ce dénommé Jay l’interpelle : « T’es pas au courant que la loi interdit aux noirs de toucher à des femmes blanches ? » Une bagarre de rue éclate et laisse Virgil – à un contre trois – au sol avec le nez en sang. Des supérieurs mettent un terme à cette stupide altercation raciste. Compte tenu de ses excellents états de service, Virgil se retrouve simplement muté à Brest, où les combats se poursuivent et où ses compétences d’artilleur seront plus utiles. Il lui faut, à ses camarades et lui, plusieurs semaines pour emprisonner 36 000 teutons… et la ville est en ruines. Ils doivent alors rejoindre Sissonne en jeep, mais la tentation de faire une pause à Paris est trop grande. Virgil s’autorise une journée de permission, afin d’aller voir la seconde famille fondée par son père – dont sa demi-sœur, qu’il ne connait pas…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Un cinquième diptyque mettant en scène des troupes américaines durant la seconde guerre mondiale débute avec ce tome 9. Philippe Jarbinet poursuit sa grande œuvre au long cours, centrée sur la période qui le passionne. L’auteur complet avoue en postface que ce qui lui a servi de matière première pour ce diptyque lui a été fournie par l’élection de Trump et par les tensions raciales qui n’ont pas manqué d’accompagner son mandat. Voilà donc Virgil Burdette – le GI noir qui joue de la guitare en couverture – qui se retrouve à devoir faire alliance avec un compatriote camarade quelque peu raciste, Jay. Lors de leurs premières rencontres, Virgil et Jay se mettent des bourre-pifs, histoire de bien planter la mentalité. Evidemment, la fraternité entre soldats du même bord, de même nationalité, entre deux mêmes combattants de la liberté, va les forcer à se valoir protection et respect, à mesure qu’ils participent à la libération de la France et de la Belgique. Le récit débute à Nice, sous un soleil estival et festif, pour se poursuivre en Bretagne (la libération de Brest), à Paris (la rencontre avec la famille), puis surtout sur la bataille de Saint Vith. Durant 2 mois de l’hiver 1944-45, aux abords de cette ville stratégique à la frontière entre Allemagne, Luxembourg et Belgique, se crispa la bataille des Ardennes, durant un hiver particulièrement enneigé. La nuit et la neige donnent lieu à de nombreuses pages en quasi noir et blanc, toujours particulièrement exquises à travers le somptueux dessin en couleurs directes de Jarbinet. On ne peut lui reprocher qu’une difficulté à distinguer les visages (les protagonistes ont tendance à tous se ressembler, qu’ils soient blancs entre eux ou noirs entre eux). En revanche, on passe de nouveau des moments poignants en immersion grâce au travail sur les décors, costumes, véhicules… Quel joli boulot ! Suite et fin de ce qu’on espère être une histoire d’amitié au tome 10.