L'histoire :
Rebekka, une adolescente qui vit en Norvège, ramasse ses affaires et s'apprête à quitter la maison. En sortant, elle voit sa mère devant le poste de télévision. Ils sont en train d'évoquer le tragique souvenir du mois dernier. Des terroristes ont frappé la Norvège. Instantanément, Rebekka se retrouve projetée ce 22 juillet 2011. Elle se rappelle très bien où elle était. Elle est au skatepark avec son amie Fariba. A ce moment, elles entendent un gros bruit alors qu'elles s'entraînent. Fariba pense que c'est l'orage, mais Rebekka sait que c'était autre chose, sans savoir exactement ce dont il s'agit. Et puis, elle voit de la fumée. Fariba en vient à la conclusion que cela doit être des travaux. Et les jeunes filles reprennent leur skate et réinvestissent la rampe. Quelque temps plus tard, elles consultent leurs téléphones. Elles ont chacune une dizaine d'appels manqués de leurs parents. D'ailleurs, la mère de Rebekka rappelle et l'adolescente décroche. Rebekka chasse ces idées de sa tête, et s'ancre à nouveau dans le présent. Elle met son casque sur ses oreilles et rejoint ses amis pour une soirée au coin du feu en pleine nature, pour clôturer les vacances d'été. Celle-ci ne se passe pas tout à fait comme les jeunes l'ont imaginée. Les parents appellent plusieurs fois, et la maman de Rebekka lui demande de rentrer à la maison immédiatement. Mais la jeune fille refuse. Les adultes sont encore traumatisés par l'attentat terroriste, ils ont peur. Les jeunes espèrent que tout redeviendra normal prochainement. Si Rebekka se voile la face, elle aussi est obsédée par cet événement qui la travaille énormément. Elle veut chercher à comprendre.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Nora Dasnes est l'autrice de L'année où je suis devenue ado. Elle propose ici un titre pour la tranche d'âge supérieure, qui s'attarde sur un sujet lourd et dur. D'ailleurs, cela se sent dans le changement de son style graphique et des choix de colorisation. Ici, les teintes de bleus dominent. Parfois, le rouge fait irruption de manière violente dans les planches de la bande dessinée. Mais ces choix ont un sens, en adéquation avec le scénario. L'autrice s'inspire en effet de sa propre expérience, de son propre ressenti. Elle avait 16 ans lorsque les attentats de 2011 sont survenus en Norvège. Elle raconte ce traumatisme sociétal dans ce roman graphique, à travers le personnage de Rebekka. L'adolescente ne connaissait pas les victimes, elle n'était pas présente sur les lieux de l'horreur. Pourtant, cela l'a marqué au fer rouge. Elle a entendu du bruit, elle a vu la fumée, elle a été témoin du changement d'attitude des adultes. Et puis, les médias se sont emparé de l'affaire, jusqu'à saturation, créant encore plus un climat anxiogène. Elle veut comprendre « pourquoi ». Elle se sent concernée. Et son quotidien en est perturbé. Elle a des flashs de ce qu'elle a vécu, matérialisés par un changement de couleur des cases. Le sujet pourrait rebuter certains lecteurs. Pourtant, l'autrice réussit brillamment à dépeindre les impacts psychiques d'un tel drame. Elle ne revient pas sur les faits en tant que tels, elle ne porte pas de jugement. Mais elle nous montre sous plusieurs facettes, en utilisant divers personnages, ce que cet acte terroriste a engendré chez les humains, chez les populations norvégiennes en particulier. Et elle pose la question : comment réussir à continuer à vivre, à surmonter l'horreur et les traumatismes indélébiles ?
