L'histoire :
Jusqu’à ce jour, Augustin, 13 ans, vivait relativement paisiblement au sein d’une bastide provençale, au cœur de l’exploitation viticole familiale. Il était entouré de sa mère Lucette, relativement effacée, de sa grand-mère Geneviève, veuve, qui régentait la petite entreprise avec fermeté et humanité, et de son père Maurice, un bon à rien alcoolique. Sans la présence de Geneviève, qui imposait le respect autour d’elle, il en serait sans doute venu à frapper ses proches. Oui, mais voilà : aujourd’hui, Geneviève vient de mourir, des suites d’une chute accidentelle dans l’escalier. Enfin, ça, c’est la version officielle… Car Augustin était présent, seul, au rez-de-chaussée de la bastide, quand il a entendu son père et sa grand-mère se disputer violemment à l’étage. Et il a parfaitement compris que Geneviève n’avait pas vraiment « glissé » dans les escaliers : c’est son père, l’infâme personnage, qui l’a poussée ! Acculé de dettes par des créanciers gangsters, ce dernier voulait vendre la bastide… et Geneviève s’y refusait obstinément. Le problème, c’est qu’à l’instant même où Augustin a pris conscience du meurtre perpétré par son père, il s’est enfuit, droit devant lui, sans s’arrêter, jusqu’à la plage. Tous les employés de la vigne l’ont vu et se sont demandé ce qu’il lui arrivait. Les gendarmes qui mènent l’enquête ont compris qu’il ne s’agissait pas d’un accident et le comportement d’Augustin en fait un témoin particulièrement suspect…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
D’emblée, ce petit one-shot de derrière les fagots nous annonce la mort de la grand-mère et la peine inhérente que cela provoque sur cette petite communauté, à l’exception du père. Car immédiatement ensuite, on se met à découvrir le contexte familial particulier de tensions qui régnait entre ce père, cumulant tous les défauts, et les autres. Ce faisant, le scénariste Olivier Mau brosse une subtile galerie de portraits, aux caractères bien définis et parfaitement cohérents, ménageant de fait son suspens. Les évènements tragiques se dévoilent petit à petit, avec le frémissement inhérent au fait qu’on les sent venir. Découle alors le temps de l’enquête de gendarmerie, une sorte d’arbitrage autoritaire qui sera de toute façon incompétent à régler les vrais problèmes d’Augustin. Cet épisode se déroule tandis que des sentiments contradictoires s’entremêlent en désordre dans la tête du jeune protagoniste. La grande force du récit est de parvenir à cerner admirablement le cataclysme psychologique chez le garçonnet. On est pris à la gorge par cet insupportable état de fait, entre culpabilité, lâcheté, cri muet de désespoir… Franchement, chapeau ! Le tout est en outre mis en relief par des encrages noirs et blancs spontanés et parfaitement maîtrisés, une touche moderne et artistique à laquelle on peut juste reprocher un abus d’emploi de hachures, qui finissent par agacer passablement. Jusqu’à la toute dernière planche, on se demande comment tout cela va bien pourvoir se terminer… Mal, évidemment.