L'histoire :
En lisant un article sur des rebelles révolutionnaires, le journaliste allemand Karl Mertens est attiré par la situation politique à Cuba. Il décide de se rendre à Santiago de Cuba, alors que l’île est en pleine ébullition : Fidel Castro se cache pour organiser la lutte contre le dictateur impérialiste Batista. Karl est amené en secret devant le chef révolutionnaire et il réalise une interview qui le marquera à jamais. Fasciné par le charisme du chef rebelle et par la beauté du soldat Lara, il décide de rester dans l’île et de suivre le long et dangereux périple des Révolutionnaires. C’est l’occasion de raconter tout sur Castro, dans les moindres détails : l’enfance de Fidel, son engagement vis-à-vis des démunis, ses relations amoureuses, sa lutte politique et militaire, ses discours enflammés… De la lutte dans la jungle à l’accession au pouvoir, de l’embargo américain à l’alliance avec l’URSS, de la dictature de Fidel à la famine, Karl voit Cuba évoluer, grandir et souffrir au gré des décisions et des actes d’un seul homme : Castro !
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Plutôt que de faire une biographie historique et pédagogique, Reinhard Kleist a ici décidé de créer un personnage fictif (son double ?) pour raconter la vie tumultueuse et controversée de Fidel Castro. Un choix payant, car la narration est ainsi très romancée et vivante. On oublie facilement le catalogue historique des évènements marquants pour aborder l’histoire de la révolution cubaine de l’intérieur. Ainsi, tout est brossé à la vitesse d’une vie qui passe (celle du narrateur Mertens) : la lutte armée et secrète de Castro et de ses hommes, les attentats contre le leader communiste, le personnage emblématique Che Guevara, l’embargo économique de l’île, le débarquement à la Baie des Cochons, la guerre froide et l’installation des missiles nucléaires, l’assassinat de Kennedy au moment où les USA étaient prêts à se rapprocher de Cuba, la rencontre avec Gorbatchev, la fin de vie du dictateur Castro… Un immense souffle passe dans l’île cubaine : le souffle de l’Histoire, marqué par l’action pugnace du leader de ce pays. La narration habile étudie le phénomène révolutionnaire à travers une expérience individuelle. Mais c’est en réalité un résumé parfait des mentalités collectives de l’époque : le journaliste est tout d’abord transfiguré par les idéaux marxistes défendus par les guérilleros cubains, puis au fur et à mesure de la dictature de Castro, il devient désenchanté et perd ses convictions profondes. C’est que l’art de Kleist est de raconter la destinée unique de Fidel Castro, sans jamais oublier de la croiser avec celle plus humble des Cubains. Ainsi, on passe d’un gros plan magnifié de la figure de Fidel à un plan large de la ville cubaine et de ses quartiers populaires, comme une terrible opposition. Le graphisme et la réflexion de l’auteur pointent les grandeurs et décadences du système révolutionnaire façon Castro. On a ainsi un aperçu complet et intelligent d’un des grands hommes du XXème siècle. A l’image du texte et de l’intrigue, le dessin est très fluide et ultra précis sur les décors et les figures d’hommes qui ont forgé l’histoire de Cuba, en bien ou en mal (Camilo Cienfuegos, Che Guevara, Batista, Richard Nixon, Gorbatchev…). Malgré un recul et une volonté de ne pas prendre parti, on sent que l’auteur partage sa fascination pour l’homme charismatique, avec l’ombre du non moins fascinant Che Guevara. A découvrir, tant pour les puristes que pour les non-initiés de cette période de l’histoire.
