L'histoire :
Chine, années 30. Après avoir appris la photographie et s'être épris d'un jeune peintre, Li revient au pays. Elle n'a plus de nouvelles de son père Zhang Xi Shun et les dépêches provenant de l'Empire du Milieu sont alarmantes. En revenant, elle compte aussi pouvoir réaliser son rêve : interviewer pour son journal, Mao, qu'elle admire plus que tout. Petit, Zhang Xi bénéficiait de l'attention exclusive de sa mère, qu'il surnomme affectueusement, Maman-Lune. Elle lui apprend la calligraphie, la poésie, la musique, la peinture. Pour son père Hio Chu, c'est une honte, son fils va devenir une femme, si ça continue comme ça. Comme souvent, Maman-Lune doit subir les assauts sexuels violents de son mari. Zhang est écœuré par cette situation. Pour se venger d'un énième acte de violence de son père, il place les boules de son boulier dans l'escalier, ce qui provoque la chute de son père... immobilisé avec un plâtre. Quatre plus tard, Hio Chu discute avec un vieil ami et lui fait part de son désarroi : sa première épouse et son fils Zhang lui causent beaucoup de tourments. Cet ami lui apporte un conseil qui va changer la vie de Zhang...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La fille de l'eunuque se focalise sur deux histoires en parallèle : celle de Li qui revient en Chine avec le rêve modeste et fou de rencontrer le charismatique Grand Timonier. Il fait soulever les foules, offrant des lueurs d'espoir pour un avenir meilleur. En outre, on découvre l'enfance de Monsieur Zhang Xi Shun avec sa mère aimante, son père tyrannique et comment il est devenu eunuque. Cette construction narrative élaborée aux petits soins par Maryse Charles met en lumière toute l'émotion froide qui traverse Zhang d'un côté et toute l'émotion chaude qui habite Li totalement subjuguée par Mao. Rapidement, ses illusions tombent à l'eau... Les textes sont limpides, transportés littéralement par leur poésie, tout en n'oubliant pas d'apporter leur lot de références. Connaissiez-vous les fameux (enfin, il faut le dire vite !) champignons Ningbo qui, une fois ingérés, offrent une litanie de souffrances atroces ? Jean-François Charles montre une nouvelle fois son talent graphique (que l'on ne présente plus) avec son trait et ses couleurs éthérées, propices à l'évasion et à la douce légèreté. C'est toujours aussi beau, avec des planches en une page qui s'apparentent à des tableaux. On se retrouve plongé dans une époque, on en capte l'atmosphère, on a l'impression de sentir les odeurs de Shanghai, de ressentir la chaleur des lieux et de figurer parmi les protagonistes. On est au cœur de l'histoire, dans la Grande Histoire.