L'histoire :
« Le 18 mars 1941, je me trouvais en Abyssinie orientale, à Harar. Je devais y rencontrer Henry de Monfreid, ennemi d’Hailé Sélassié, l’Empereur éthiopien. A ce moment-là, juste au-dessus de ma tête, il y eut un duel aérien entre un biplan italien et deux Hurricane sud-africains. L’avion italien tomba près de la ferme de Henry de Monfreid. En arrivant sur les lieux de l’accident, j’ai constaté la présence d’un officier sud-africain et de quelques soldats coloniaux. L’officier – le Major Melrose – avait abattu l’avion. Il commença à me raconter cette belle histoire de loyauté, d’amour et de mort »…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans un ciel lointain est un des derniers récits qu’Hugo Pratt a créé, car il est initialement paru en 1996, le génie transalpin nous ayant quitté l’année précédente. A défaut d’être un testament, cet album est typiquement représentatif de l’univers de l’artiste. Si on se penche un peu sur sa biographie, on remarquera aisément qu’il a consacré une place prépondérante aux récits de guerre. Que dire de l’Afrique, terre qu’il connut particulièrement bien ? En effet, une des particularités de ce récit est que l’auteur se trouvait sur les lieux au moment qui correspond à cette aventure dramatique. Son père était militaire de carrière et il était affecté en 1941 en Ethiopie, une colonie italienne. Il y mourut un an plus tard. On peut donc légitimement penser qu’une partie de cette histoire, qui met en scène deux frères pilotes séparés par l’amour qu’ils vouent à une même femme, renferme aussi des éléments personnels. Comme souvent avec Pratt, on a le sentiment que les personnages, dont l’issue tragique ne fait aucun doute, sont détachés de leur propre sort. L’honneur, le devoir à accomplir et la dignité, sont les moteurs psychologiques des uns et des autres, et personne ne déviera de cette ligne de conduite. Et comme à chaque fois sous la plume de Pratt, la tragédie n’est jamais pompeuse. On retrouve donc sa narration si particulière, qui traduit une grande pudeur, épousant par là-même les codes du romantisme de la littérature du XIXème siècle. Quant aux dessins, est-il besoin de préciser qu’ils touchent au sublime, avec la colorisation remarquable de Patricia Zanetti ? Cet album, comme beaucoup d’autres, reste dans l’ombre de Corto Maltese, dont l’énorme succès éclipse quelque peu les autres créations de maître Pratt. Pour autant, il est remarquable, à plus d’un titre…