L'histoire :
La tempête s’est levée en cette fin d’après-midi de février 1963. Emily fait ses cartons pour quitter l’hôpital de Klontown à la fin de la semaine, le temps de mettre de l’ordre dans ses affaires. Elle remet alors la main sur un de ses journaux intimes. Comme hypnotisée, elle ne peut s’empêcher de replonger dans cette étrange mais intense partie de sa destinée. 40 ans plus tôt, elle partageait en effet la vie avec un indien du nom de Yuma. Sous l’œil jaloux du rapace Kraa, avec lequel Yuma entretient une relation fusionnel, Emily trouve quand même sa place dans cette région sacrée et oubliée de la vallée. Malgré les encouragements d’Emily, Yuma ne sort pas du mutisme traumatique dans lequel il s’est enfermé à la mort de ses parents. Il ressent le besoin de la transe pour communiquer avec ses fantômes. Cela n’empêche pas le couple de vivre dans l’harmonie simple offert par la nature. Hélas, le bonheur est de court instant. Il est temps pour Yuma et Kraa de reprendre leur chasse vengeresse.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
C’est d’abord du point de vue d’Emily que Benoît Sokal raconte la fin de cette histoire. Au travers de son journal intime, le présent renoue avec un passé qui n’a pas encore fini de dévoiler ses mystères. Cette nouvelle posture narrative amplifie la mise en exergue de la cruauté humaine. Celle-ci est révélée par comparaison avec la froideur du rapace prédateur Kraa, au travers du regard de cette jeune femme. Sokal ne nous épargne rien au niveau des émotions. Tout est dit avec tellement de naturel, tant au niveau des images que du discours, que l’on ressent avec effroi, au fond de ses tripes, les moindres sentiments de ce huis clos de vallée. Les fans de l’auteur reconnaîtront son cynisme maîtrisé et seront sans nul doute convaincu par cette fin de récit très réussie. Le graphisme crayonné original et expressif de ce triptyque abouti n’est pas étranger à cet équilibre fragile si rarement atteint. Sokal vient ici d’achever une de ses plus belles œuvres, à laquelle il sera difficile de rester indifférent.