L'histoire :
Benjamin Legrand est l’un des scénaristes du film d’animation Avril ou le monde truqué. Il raconte comment cette fantastique aventure est née. Cet amateur de mots et d’histoires connaît le grand Jacques Tardi depuis longtemps. Ensemble, ils ont créé la bande dessinée Tueur de Cafards. Grand amateur de science fiction, il va même travailler avec Philippe Druillet. Legrand fait un rêve depuis longtemps : faire une série animée avec son ami de toujours, Jacques Tardi. L’univers va de soi et ce sera sur la première guerre mondiale, racontée en animé. A l’époque où Tardi avait déjà marqué la BD de son empreinte sur les récits de la Grande Guerre, les deux comparses sont décidés à mettre en route leur projet. Ils trouvent un producteur pour lancer l’aventure et Tardi est tellement impatient qu’il commence déjà à faire des dessins préparatoires et des story-boards. Legrand le freine et lui demande d’être patient. Bien lui en a pris car, malheureusement, les choses se déroulent mal. Le producteur veut changer de scénariste et engage un auteur qui avoue ne rien connaître sur la première guerre mondiale ! Tardi, fidèle en amitié, refuse catégoriquement et le projet en reste là. D’autant que le producteur n’aura finalement jamais donné le jour à ce fameux animé sur la guerre 14-18. Pas démobilisé pour autant, Benjamin crée petit à petit un autre univers qui pourrait plaire à Tardi. Ce ne sera plus la guerre, mais un steampunk rétro. Il finit par rencontrer Franck Ekinci (l’autre scénariste du film) grâce à sa fille qui a travaillé avec lui. Avril ou le monde truqué commence à voir le jour…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Au moment de la sortie de l’animé Avril ou le monde truqué, l’un des scénaristes, Benjamin Legrand, tient à rendre hommage à l’équipe du film à travers ce bel art-book. Bien sûr, il met particulièrement en avant la personnalité et le travail de Jacques Tardi, à l’origine de nombreux dessins de l’animé. Ce making-of est constitué d’une longue préface où Legrand raconte toutes les étapes de la création du film. Cette préface fourmille d’anecdotes cocasses sur la façon dont une œuvre voit le jour ou connaît des difficultés à se réaliser. On voit bien à travers ce témoignage la personnalité pleine de générosité de Tardi. L’auteur de bande dessinée ne ménage pas ses efforts, mais il a dû vite se faire une raison. Avec 250 personnes à manager et sept ans de travail, Tardi ne pourrait pas être le réalisateur du film, ni assurer tous les dessins. Certains de ces story-boards n’ont d’ailleurs même pas été conservés. Occupé également par son œuvre Moi, René Tardi, prisonnier au Stalag IIB, Tardi sera tout de même présent pour de nombreuses étapes, donnant son avis et quelques dessins préparatoires. Après cette préface passionnante pour les amateurs d’art, Legrand détaille chacun des personnages de l’animé : le chat parlant Darwin, le Gavroche au grand cœur Julius, le savant illuminé Pops, le flic intègre Pizoni et, bien sûr, la mutine Avril. Là encore, on apprend quelques anecdotes croustillantes sur la création du film : saviez-vous que le chat de Tardi, Mapou, a servi de modèle pour Darwin ou que Tardi voulait au départ qu’Avril porte un costume marin ? Accompagné de nombreux croquis et dessins préparatoires pour la fabrication des personnages, on entre de plein pied dans le graphisme saisissant de Tardi. Au feutre ou à la peinture, Tardi n’a pas son pareil pour camper des gueules et un univers. Avril et les monstres bigarrés de l’animé nous rappellent furieusement la série Adèle Blanc Sec. Pour couronner le tout, Legrand nous offre un des carnets de story-boards du début du film (Tardi en a produit douze, la plupart non retenus pour le film). Entièrement dessiné par Tardi et réalisé comme une bande dessinée, on frémit de plaisir devant tant de maîtrise et de talent. Ce complément au film n’est certes pas indispensable et ne pourra pas remplacer l’animé, mais il constitue toutefois un bel hymne au travail de Tardi et sera un bel art-book pour les fans de ce grand bonhomme du septième art.