L'histoire :
Après une nuit de sommeil peuplée de rêves étranges, Albertus se réveille au milieu de son groupe d'amis. Nous sommes en 1959 à Katmandou, et l'heure est à la découverte des substances hallucinogènes les plus diverses, dans la foulée des précurseurs américains aux origines de la beat generation. Mais lorsqu'il quitte la maison commune pour une balade dans la ville, le jeune homme ne sait pas encore qu'il ne reviendra jamais. Embarqué par deux hommes alors qu'il espionnait la fenêtre d'une maison où était entrée une très jolie fille, il va plonger dans une aventure totalement imprévue. Pris pour un espion du gouvernement, il est fait prisonnier par des rebelles Khampas. Ce groupe de résistants refuse les compromissions du gouvernement népalais, et les concessions faites initialement au gouvernement chinois. Ils l'embarquent vers les montagnes, et c'est seulement un remède qu'il propose à l'un des rebelles malades qui va lui permettre d'obtenir un peu de considération. Il va alors apprendre à connaître la belle Dolma, le courageux Kiap, et l'étrange américain qui semble apporter un soutien crucial à cette rébellion armée...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après un début assez improbable, avec ce groupe d'amis totalement perdus dans la consommation de drogues en tous genres, c'est en fait vers un étonnant retour sur les premières heures de l'occupation chinoise que l'auteur nous emmène. En partageant le quotidien d'un groupe de rebelles méconnus du grand-public, il nous en dit plus sur la manière dont le Dalaï Lama était vu dans ces premières années de résistance. Un point de vue historique qui bouscule les a priori, excite la curiosité et appuie une hypothèse apparemment solide qui veut que la CIA a tenté de soutenir une résistance interne dans les années 50. Mais le récit de Loïc Verdier et Matthieu Alexandre est tout sauf une tranche d'histoire. Il raconte les aventures incroyables d'un jeune hippie embarqué dans la fuite d'un groupe de résistants en armes, juste pour avoir suivi une jeune fille trop belle à la sortie d'un bar. L'aventure est aussi une belle balade au cœur de paysages très bien rendus. Le style semi-réaliste faussement rapide de Verdier sait devenir remarquablement épuré et aérien lorsque le récit le demande. Le format du roman graphique convient très bien à cette épopée surprenante, le lecteur a tout le temps nécessaire pour oublier où il se trouve et ouvrir des yeux étonnés. Alors, même si l'aventure semble se dérouler sans canevas narratif structuré, le résultat est un livre étonnant et plein de personnalité.