L'histoire :
En avril 1641, Sir Francis Edgard MacLaury et tous ses hommes sont assassinés par des indigènes, au sud de l’île de Java, où il avait établi un camp de base. Vu la distance de ce comptoir néerlandais avec le continent européen, il faut attendre deux années pour que Sir James Eddington, l’enquêteur de la couronne britannique, débute des investigations sur place. N’en déplaise aux régisseurs de la VOC (Compagnie néerlandaise des Indes Orientales), Eddington fait aussitôt valoir son opiniâtreté et son indépendance. La famille de Sir Francis dispose en effet d’une oreille plus qu’attentive du roi Charles… Eddington demande à être conduit sur le site même de cette attaque, les ruines d’un temple. Les détails de cette affaire sont entièrement relatés dans un journal écrit, que déniche William, le fils du Major Arthur Joyce Byron Pike, dans une malle du grenier en 1663. Or à ce moment-là, le Major mène lui aussi une enquête quelque peu insolite, à proximité de la ville d’York : un corps sans membre a été retrouvé à proximité de deux jambes droites, qui ne lui appartiennent pas. Ces restes humains sont envoyés en autopsie auprès du docteur MacPell…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Pour cette nouvelle série historique – et une nouvelle fois partiellement maritime – Jean-Yves Delitte nous convoque de l’autre côté de la planète, sur l’île de Java, à l’époque des grandes conquêtes commerciales (il y 350 ans), pour une double enquête policière aussi insolite que… laborieuse. Le parti-pris narratif délivre deux fronts d’investigations, séparées de 20 années et délivrées en alternance. On saute ainsi régulièrement de l’un à l’autre, sans transition. Dans les deux cas, un enquêteur doit résoudre des meurtres sauvages, qui n’ont pour le moment qu’un rapport ténu entre eux. Car le journal de bord de l’un des enquêteurs (celui sur Java en 1643) est lu a posteriori par l’autre (celui de York en 1663). On espère qu’un lien logique finira par poindre… Au rayon des bons points, la reconstitution historique semble documentée et travaillée. On en apprend quelque peu sur les usages commerciaux entre l’Europe et les lointaines colonies ; on s’étonne aussi de voir si tôt la police scientifique à l’œuvre ! (les ancêtres des Experts et de Body of proof). Autre bon point, qui n’est pas vraiment une surprise : les encrages réalistes de Delitte sont splendides sur les décors et les gréements… et indécrottablement caricaturaux et figés sur les faciès et les postures des personnages. Le savoir-faire de Delitte est une horlogerie millimétrée, mais sans âme. Une partition toujours réitérée, qui a ses fans et ses détracteurs. Reste aussi et surtout que malgré leur exotisme et leur croustillant, les deux enquêtes demeurent bien ternes pour le moment, s’étalant en palabres et en conjectures sans rythme, bien que fort correctement dialoguées. Espérons que la suite soit plus rock n’roll…