L'histoire :
En Vietnamien, « habiter » s’écrit en une lettre, une simple voyelle. Ancien jardin colonial jusqu’à la guerre d’indépendance, Hanoï ressemble à une métropole encore verte. Un entassement baroque de constructions de tous âges, confessions ou horizons, hérissées d’antennes. Dans les rues grouillantes de vie sont installés sur chaque poteau électrique des hauts-parleurs qui déblatèrent toute la journée un flot de paroles qui pour l’étranger résonne comme un rappel à l’ordre continuel. La voix du régime populaire, soucieux du contrôle de ses ouailles, poursuit Gérald Gorridge. Le voyageur n’est pas à proprement parler un néophyte. Grand amoureux de la rouge capitale (en opposition à Saïgon), il arpente son labyrinthe de rues enchevêtrées dont il croque à l’envie ses fantômes. Car Hanoï est une porte entre deux mondes, encore hantée par son passé alors que la modernité s’invite inexorablement. Tham ou Hop peuvent en témoigner, jeunes femmes à la fois libres et prisonnières des traditions…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
C’est à un récit très adulte, empli de vie et de tendresse, que nous convie Gérald Gorridge. Un voyage d’une grande curiosité au cœur de l’âme du Vietnam, ce qui fait sa réalité aujourd’hui et son avenir possible. Armé seulement de papier et crayon, l’artiste défie l’omniscience du régime et croque à l’envie les rues grouillantes d’Hanoï la Rouge. Sa bonne connaissance de la langue du pays comme de ses habitants, l’aide à progresser (timidement) et d’en saisir l’essence. Amour ou passion ? Ses sentiments se heurtent souvent à un mur d’incompréhension. Ancien jardin colonial, le Vietnam est un pays assis entre deux chaises, d’un côté un lourd passé de traditions, de l’autre une soif de liberté inéluctable. Aux haut-parleurs rabat-joie répondent des femmes émancipées et volontaires. La modernité s’invite à chaque ruelle, à chaque page de cette chronique urbaine. Pourtant, on ne fait pas table rase du passé sans que subsistent ses fantômes. Internet, oui mais point chez le particulier : un semblant de contrôle demeure dans les faits comme dans les consciences. Carnet de bord et d’esquisse, le trait semble tracer à main levée, à l’estime, tout aussi séduisant à la lecture que reboutant de prime abord, saisissant contours et silhouettes essentiels plutôt qu’un quotidien figé. La mise en couleurs exploite une palette riche, chaude et avenante. Parce qu’atypique, se jouant des codes pour plus de vie et de liberté, Les fantômes de Hanoï ne plaira pas à tout le monde, cependant sa sincérité touchera les curieux qui s’y aventureront…